Les libéraux avaient promis que leur conférence des «grands penseurs», qui se tient cette fin de semaine à Montréal, aborderait de front plusieurs questions, mêmes les plus périlleuses d'un point de vue politique. Ils n'avaient pas tort.

La journée de samedi a donné lieu à des débats sur la taxe sur le carbone et sur la possible nécessité de hausser les impôts pour faire face aux coûts d'un système de santé en pleine explosion.

De toute évidence, l'exercice de trois jours, qui réunit une cinquantaine de conférenciers et environ 250 invités, et qui se veut un remue-méninge pour orienter les politiques futures du parti, a fait sortir les libéraux de leur zone de confort.

L'ancien gouverneur de la Banque du Canada, David Dodge, a parti le bal tôt ce matin en insistant sur la nécessité de tenir une discussion «adulte» sur l'avenir du système de santé. Avec le vieillissement de la population, il est complètement faux, a-t-il dit, de prétendre que l'on peut continuer avec le modèle actuel sans rien y changer.

«Vous pouvez le faire sans augmenter les impôts, a noté M. Dodge. Mais vous devez être honnête et dire ce que cela veut dire : que vous allez réduire les services que vous fournissez.»

Selon lui, le problème s'étend à d'autres secteurs des activités des gouvernements provinciaux et fédéral, et ceux-ci devront prendre des décisions difficiles dès le budget de l'année prochaine. «Il n'y a pas de solution magique», a-t-il martelé.

Taxe sur le carbone

Autre sujet sensible : le boulet politique traîné par les libéraux fédéraux lors des dernières élections fédérales, la taxe sur le carbone, a refait surface samedi après-midi lors des panels sur l'environnement et a donné lieu à un débat animé.

Des participants ont plaidé en faveur de l'adoption de la mesure dans la prochaine plateforme électorale puisqu'il s'agit, selon eux, du moyen le plus simple et efficace pour lutter contre les gaz à effet de serre et les changements climatiques.

D'autres ont protesté contre ce qu'ils ont décrit comme un suicide politique. C'est le cas de Raymond Garneau, ancien ministre des Finances sous Robert Bourassa, qui s'est rendu au micro deux fois plutôt qu'une pour exhorter les troupes libérales fédérales à ne pas répéter leurs erreurs du passé.

«Je trouve que c'est une bonne façon, mais est-ce qu'on va atteindre notre objectif si on se fait battre?» a-t-il demandé.

L'énergie, l'environnement et l'économie formaient l'un des volets abordés samedi lors de la conférence qui se tient au Complexe Desjardins. L'autre volet, présenté par David Dodge, a été celui des défis des familles canadiennes, ce qui a permis d'aborder les questions de la santé et de la retraite des Canadiens.

Risques

Durant une discussion avec La Presse, un haut dirigeant libéral a convenu que le pari de son parti de tenir des discussions franches dans un cadre ouvert était risqué. «Mais c'est le prix à payer pour avoir de vraies discussions», a-t-il dit.

«Ça fait quand même changement des discours politiques que l'on entend habituellement, de la prudence et des formules toutes faites», a de son côté noté une militante de longue date.

L'organisation s'assure tout de même de garder le contrôle de l'événement et des animateurs prennent soin d'en vanter haut et fort les mérites et le succès entre les apparitions des conférenciers.

«Ce qui est en train de se développer sous nos yeux, c'est la discussion de politique publique la plus inclusive que ce pays ait jamais vu, et vous êtes en train de le vivre!» a lancé au micro Randy Boissonnault, qui s'occupe des interactions avec les internautes.

La conférence, en effet, est retransmise sur le web, à l'adresse https://www.can150.ca/. Les organisateurs étaient fiers de rapporter que la vidéo en ligne avait attiré 9 500 personnes le premier jour et que l'événement était devenu le sujet le plus discuté au Canada sur le réseau Twitter.