Le centre culturel de Sainte-Marguerite-du-Lac-Masson est sauvé. Le ministère de la Culture et des Communications vient de publier un avis d'intention de classement pour le bâtiment Art déco, dernier vestige du domaine de l'Estérel (Laurentides), construit en 1936 par un architecte belge renommé.

Cet avis vient stopper net le projet de rénovation du promoteur HBO, qui souhaitait transformer le bâtiment en condos, avec la complicité de l'équipe municipale en place.

«On ne cachera pas que c'était vraiment in extremis, lance Sophie Goyette, farouche opposante au projet qui menaçait le centre. C'est une intervention extraordinaire. Et d'autant plus courageuse que le bâtiment sera classé contre l'avis de la Ville, qui est son propriétaire. À ma connaissance, c'est la première fois que ça arrive.»

Fait à noter: l'avis d'intention de classement ne protège pas seulement le bâtiment, mais aussi le terrain autour de l'immeuble, qui devient désormais une «aire de protection».

Il s'agit d'une mauvaise nouvelle pour le promoteur HBO, qui possédait une partie du terrain et qui devra vraisemblablement revoir ses autres projets d'aménagement, mais d'une bonne nouvelle pour les habitants de Sainte-Marguerite, qui craignaient de voir leur plage publique passer aux mains du privé.

L'organisme Docomomo, spécialisé en patrimoine moderne, s'est évidemment réjoui de cet avis de classement. Selon sa directrice, France Vanlaethem, le centre culturel n'est rien de moins qu'un «jalon de l'histoire de la villégiature, une manifestation précoce et unique de la modernité architecturale au Québec et témoin des relations économiques nouées avec la Belgique au début du siècle».

Rappelons que le centre culturel de Sainte-Marguerite-du-Lac-Masson a été construit dans les années 30 à la demande du baron Louis Empain, multimilliardaire belge en quête d'associations d'affaires au Québec. Il avait donné le mandat à l'architecte bruxellois Antoine Courtens d'imaginer un domaine de villégiature ultramoderne pour la haute société nord-américaine: le domaine de l'Estérel.

Le centre culturel - qui abritait jadis un centre commercial, une salle de bal et une station-service - est le dernier témoin de cet ambitieux projet, qui incluait aussi un hôtel, un club nautique, quelques chalets et un pavillon de ski.

Le centre culturel de Sainte-Marguerite-du-Lac-Masson sera le huitième bâtiment du patrimoine moderne classé, après Habitat 67, la Maison Ernest-Cormier, le Cinéma le Château, le Mausolée-des-Évêques de Trois-Rivières, l'église Saint-Marc et la chapelle de l'oratoire de Saguenay, ainsi que la cathédrale du Christ-Roi, en Gaspésie.

La mairesse de Sainte-Marguerite, Linda Fortier, n'a pas rappelé La Presse.