La fermeture de la centrale nucléaire Gentilly-2 constitue un casse-tête pour le gouvernement péquiste. Même si la fermeture entraînera une augmentation d'environ 1,3 milliard du déficit pour l'exercice financier courant, le gouvernement promet de respecter sa Loi sur l'équilibre budgétaire.

Comment? «La réponse sera dans le prochain budget», répond simplement l'attachée de presse du ministre des Finances, Nicolas Marceau.

«Est-ce qu'ils vont s'en sortir avec des petites cachotteries comptables?», demande Jean-Marc Fournier, chef par intérim du Parti libéral du Québec. «À moins de changer le sens des mots, je ne vois pas comment ils pourront respecter la loi», ajoute-t-il.

Le déficit pourrait doubler

Cette loi interdit au gouvernement de dépasser sa cible de déficit pour 2012-2013, soit 1,5 milliard. Or, la fermeture de la centrale entraîne une radiation d'actifs chez Hydro-Québec. Elle amputera d'environ 1,3 milliard le dividende que la société d'État donne au gouvernement. Cette somme s'ajoute au déficit. Résultat: le déficit doublera presque en 2012-2013.

Selon Hydro-Québec, la fermeture de la centrale est une bonne décision à long terme. Le coût de la réfection a doublé depuis 2009 et est estimé à 4,3 milliards de dollars. À partir de 2017, la réfection aurait amputé les résultats de la société d'État de 215 millions de dollars par année.

Une loi stricte

Il reste que la perte de 1,3 milliard sera enregistrée au complet cette année. Il s'agit d'un déficit «non récurrent» et «exceptionnel», a déjà dit le ministre Marceau. Mais cela ne correspond pas aux cas exceptionnels prévus dans la Loi sur l'équilibre budgétaire. La loi ne fait état que trois cas de pertes qui justifient de dépasser les cibles de déficit: une «catastrophe» naturelle, une «détérioration importante» de la situation économique ou une modification dans les transferts fédéraux.

«Je ne vois pas comment on peut dire que fermer la centrale nucléaire correspond à ces critères», lance M. Fournier.

Il rappelle que si le déficit dépasse la cible prévue, le gouvernement doit, selon la loi, compenser ce dépassement dès l'année suivante. Québec prévoyait retrouver l'équilibre budgétaire en 2013-2014. Mais selon la loi, s'il dépasse de 1,3 milliard sa cible en 2012-2013, ce n'est pas l'équilibre qu'il devra atteindre l'année suivante, mais un surplus de 1 milliard. Et d'autres surplus de 300 millions échelonnés sur les cinq années suivantes. Cela nécessiterait de douloureuses compressions.

Québec devait décider du sort de la centrale nucléaire avant la fin de l'année 2012. M. Fournier croit que cette décision a été prise dans la «précipitation» et «l'improvisation». «Ils auraient dû mettre de l'argent de côté pour compenser», dit le chef libéral.

Annonce impopulaire

Les péquistes ont déjà affirmé que le précédent gouvernement libéral devait savoir que la réfection de la centrale n'était pas rentable et qu'il aurait sciemment reporté cette annonce impopulaire à des fins électorales.

Le mois dernier, le président d'Hydro-Québec, Thierry Vandal, a indiqué qu'il était de «notoriété publique» que la réfection de Gentilly-2 coûterait plus de 3 milliards de dollars.

«À partir du moment où on était à plus de 3 milliards, les données conduisaient directement à la recommandation qui a été faite au gouvernement, c'est-à-dire que c'était nettement plus avantageux financièrement de procéder à la fermeture immédiate», avait dit M. Vandal.