Les relations entre la Commission de la construction du Québec (CCQ) et la FTQ-Construction continuent de s'envenimer. À quelques semaines du vote sur l'affiliation syndicale, la CCQ accuse le syndicat de «laisser entendre» qu'il pourrait perturber le scrutin. Fait inusité, La Presse a appris que le directeur des affaires juridiques de la CCQ a même envoyé la semaine dernière une lettre au syndicat.

«Oui, la CCQ a fait cette intervention auprès de la FTQ», a confirmé son porte-parole, Louis-Pascal Cyr.

Arnold Guérin, président de la FTQ-Construction, trouve que la CCQ utilise l'expression «laisser entendre» pour détourner le sens de ses propos. «On va leur répondre de la même façon, par nos avocats», a-t-il lancé hier.

Le vote sur l'affiliation syndicale se déroule tous les trois ans. Seuls les syndiqués qui veulent changer d'affiliation votent. Auparavant, ceux qui votaient devaient se déplacer à un bureau de scrutin. Ce qui les exposait à l'intimidation, a déjà déploré la ministre du Travail, Lise Thériault.

Pour la première fois, c'est par vote postal - donc secret - que se fera le scrutin. Il se tiendra en juin, à la suite d'une période de maraudage. Le règlement du vote sera précisé au moment de son adoption, prévue d'ici une ou deux semaines.

La CCQ a déjà annoncé les grandes lignes de ce règlement aux différents syndicats. La rencontre à ce sujet avec la FTQ-Construction s'est déroulée à la mi-février.

«Certains représentants ont tenu des propos qui laissaient entendre qu'il pourrait y avoir des manoeuvres au moment du scrutin, pour inciter des membres de la FTQ-Construction à ne pas respecter le cadre légal. On a fait référence à la possibilité de votes multiples, de fausses déclarations pour obtenir plusieurs bulletins de vote ou des recours massifs», rapporte M. Cyr. Ces recours prendraient la forme de demandes injustifiées de révision ou de contestations massives.

Il convient qu'il est «spécial» que le directeur des affaires juridiques écrive au président d'une association syndicale. «C'est un geste sérieux qui démontre nos inquiétudes. On a averti [la FTQ-Construction] que plusieurs de ces actes pourraient constituer des infractions pénales. Si de tels gestes sont commis, on n'hésitera pas à prendre des mesures vigoureuses pour assurer le bon déroulement du scrutin», prévient M. Cyr.

La FTQ représente près de 45% des travailleurs de la construction. L'année dernière, elle a vivement dénoncé la loi qui met fin au placement syndical. Elle boycotte aussi le comité de transition de la CCQ, qui doit mettre en place le nouveau système de recommandation des travailleurs.

Arnold Guérin s'oppose au scrutin postal. Selon lui, il sera difficile de contrôler l'identité et la signature des syndiqués qui votent par la poste.

De plus, si un bulletin de vote est contesté et qu'on en envoie un deuxième, il y a risque qu'un syndiqué modifie son vote, ajoute-t-il.