Des centaines de chauffeurs de taxi ont manifesté bruyamment devant le palais de justice de Montréal, en appui à leur confrère Guercy Edmond, accusé de voies de fait armées et de délit de fuite ayant causé des lésions. L'homme de 47 ans comparait aujourd'hui pour demander sa mise en liberté en attendant son procès.

Les images captées par des témoins lorsque Guercy Edmond a roulé avec sa lourde ToyotaCamry sur Benoit Kapelli, 23 ans, ont fait le tour du monde.

On y voit, dans les instants qui ont précédé le drame, vers 4h dimanche à l'angle de la rue Rachel et du boulevard Saint-Laurent, plusieurs jeunes hommes, dont Kapelli, frapper le taxi de M. Edmond à coups de poings et de pieds, et même sauter à pieds joints sur le toit du véhicule.

À un moment, Guercy Edmond appuie sur l'accélérateur. Kapelli semble se jeter délibérément sur le capot de la Toyota, sous laquelle il glisse.

Les images qui suivent glacent le sang. On voit le taxi cahoter à deux reprises au passage des roues sur le corps et la tête de la victime.

Benoit Kapelli s'en tirera. Il est toujours hospitalisé et souffre de fractures aux côtes et de perforations à la rate et la vessie. Il se trouve à l'hôpital dans un état stable. Comme un de ses amis qui a été arrêté, il pourrait devoir faire face à la justice pour méfait.

On ne sait pas avec exactitude ce qui a causé la dispute entre les jeunes hommes et le chauffeur. Cela pourrait être lié au règlement de la course par les jeunes gens, qui venaient de descendre du taxi.

Mais peu importe la cause du drame, selon les nombreux chauffeurs de taxi qui ont bloqué la rue Saint-Antoine, ce matin, à partir de 9h, Guercy Edmond est la victime dans cette affaire, non l'agresseur.

Tous disent avoir déjà été victimes de clients ivres et agressifs qui refusaient de payer. Surtout aux petites heures, les week-ends.

Stanley Bastien, organisateur de la manifestation de soutien à Guercy Edmond, croit que la réaction de son collègue n'est pas démesurée et qu'elle est compréhensible.

«Pour être dans l'industrie depuis 16 ans, je peux vous dire que d'autres chauffeurs auraient fait pire. Il en a écrasé juste un. D'autres aurait pu en écraser sept», croit-il.

Laval Bilodeau, président du regroupement des propriétaires de taxi de Montréal, abonde dans le même sens.

«Ce gars-là n'était pas là pour faire du trouble à 4h du matin. Il était là pour travailler. Il a des enfants, presque 50 ans. Moi, quand des gars tapent sur ma voiture, je sacre mon camp. Ça m'est arrivé souvent, des clients mécontents qui tapent sur ma voiture et font des bosses. Et moi aussi, à sa place, je me serais poussé plus loin pour appeler de la police. Le gars avait tout le monde dont il avait besoin pour être secouru. Son chum a même eu le temps de le filmer», explique-t-il. Il déplore en outre avoir vu, sur la vidéo, passer trois voitures de taxi sans qu'aucun chauffeur ne s'arrête pour porter secours à son collègue.

Quant à l'accusation de délit de fuite, Dana Metelus est catégorique, ce n'en est pas un.

«Quel genre de justice on a pour accuser un gars de délit de fuite pour ça ? S'il était sorti de son auto, on l'aurait tué. Combien de chauffeurs de taxi ont été tués ? Et qui dit qu'il ne s'en allait pas au poste de police pour raconter ce qui venait de se passer ?», questionne-t-il.

«Pour moi, c'était de la légitime défense», tranche quant à lui Tony Guerrier.

Stanley Bastien travaillait avec Guercy Edmond, à l'aéroport notamment.

«Il est toujours souriant, du genre rieur. Il prend son client et le conduit, et ça se termine bien», décrit-il.

Les chauffeurs de taxi demandent la libération immédiate de leur collègue et organisent une collecte de fonds pour l'aider à assurer sa défense.

Ils ont libéré la rue Saint-Antoine vers 13h30.