«Manque de professionnalisme, attitude regrettable, dommages irréparables.» Le juge Marc David de la Cour supérieure avait peine à retenir son indignation lorsqu'il a dissous le jury et ordonné la tenue d'un nouveau procès pour Christopher Levers, ce matin, au palais de justice de Montréal.

L'homme de 31 ans est accusé d'avoir tué Dave Lockhart, 28 ans, à Lachine, le 27 mars 2010. Une dette de 10$ pour du cannabis est à l'origine d'une dispute entre les deux hommes qui a dégénéré au point où Levers aurait sorti un couteau pour poignarder la victime.

Le procès, qui devait durer quatre semaines, a débuté le 22 octobre. Après 16 jours d'audience, tout allait bien. Le procureur de la Couronne, Me Jacques Dagenais, en était à la fin du contre-interrogatoire du dernier témoin - l'accusé lui-même. Il lui a posé une dernière question: comment expliquait-il ce trou dans la poche de son manteau, alors qu'il soutenait avoir pris le couteau dans une voiture?

Or, la défense, assurée par Me Alan Guttman et Me Andrée Marier, ne connaissait pas cet élément de preuve, qui laisse croire que l'accusé a pu dissimuler le couteau dans son manteau. Les avocats ont alors présenté une requête en avortement de procès, que le juge David a accueillie.

«La Couronne doit divulguer la preuve. Cette attitude n'est pas nécessaire et est inacceptable. La défense a été piégée et prise par surprise. Le préjudice est trop grand et un avortement de procès est le seul remède à cette situation», a déclaré le magistrat. Il a également déploré le fait que le manteau et le couteau n'aient pas été expertisés afin de vérifier si le trou dans la poche était compatible avec l'arme du crime, ce qui aurait pu être fait, selon le témoignage de l'enquêteur principal au dossier.

«Cela fait 33 ans que je fais ce métier et je n'ai jamais vu ça, a affirmé Me Guttman. Je suis content de la décision, mais en même temps je trouve ça triste, car nous en étions à la dernière question posée au dernier témoin.»

De son côté, le procureur de la Couronne, Me Jacques Dagenais, s'est refusé à tout commentaire. La cause a été fixée au 7 janvier prochain. Il faudra sélectionner un nouveau jury.