Le Dr Guy Turcotte, reconnu coupable du meurtre de ses deux enfants, est l'objet d'une poursuite avec un collègue et le centre de santé où ils pratiquaient. La famille d'un jeune homme de 25 ans les accuse d'avoir causé la mort de ce dernier en ne lui accordant pas le suivi nécessaire malgré une grave maladie cardiaque.

Les proches du jeune homme réclament 432 000$ aux deux médecins et au centre de santé et de services sociaux de Saint-Jérôme. «Si mon fils avait été pris en charge, il serait encore là», croit sa mère, Monique Major.

Arythmie cardiaque

Le 21 janvier 2011, le corps de Jonathan Major Labelle a été trouvé dans la salle de bains de son appartement de Saint-Jérôme par des collègues. Une autopsie a révélé que l'homme, qui souffrait d'une cardiomyopathie hypertrophique sévère diagnostiquée cinq ans plus tôt par le Dr Turcotte, est très probablement mort d'une arythmie cardiaque secondaire à sa condition, dont une des conséquences connues est la mort subite.

Selon la famille, le cardiologue n'a pas suffisamment encadré son jeune patient durant les trois années où il a été son médecin. On lui reproche d'avoir fait une évaluation incomplète de son état et de ne pas lui avoir fait subir tous les tests nécessaires. La famille accuse en outre le centre de santé et de services sociaux de Saint-Jérôme, où était traité Jonathan, de ne pas l'avoir dirigé vers un autre spécialiste lorsque Guy Turcotte a subitement cessé de pratiquer après avoir causé la mort de ses enfants.

«Mon fils est tombé dans une craque, affirme Mme Major. Il allait à l'hôpital et demandait s'il pouvait voir un cardiologue, mais rien ne bougeait.» Il aura fallu que le patient perde connaissance, chez lui, pour qu'il puisse finalement voir un autre médecin. «Ça faisait presque deux ans qu'il n'en avait pas vu», allègue sa mère.

Le cardiologue en question, le Dr Patrick Rabbath, a vu Jonathan le 8 décembre 2010, à peine un mois avant sa mort. Il a alors confirmé le diagnostic de cardiomyopathie, maladie du muscle cardiaque, fait par son prédécesseur, et relevé une inquiétante histoire familiale de mort subite. Malgré cela, il a donné son congé au jeune homme.

Sa dépouille a été récupérée par les ambulanciers 32 jours plus tard dans son petit logement. Le décès a été confirmé à l'hôpital.

Ignorance

«C'est après ça qu'on a vraiment compris ce qu'était la maladie de notre fils, dit Monique Major. Avant, on ne connaissait presque rien. Tout ce que Jonathan savait, c'est qu'il ne pouvait pas lever de poids ou faire de sports extrêmes.» Selon la femme, toute la famille a été prise en charge et équipée de défibrillateurs après la mort du jeune homme. «Pourquoi n'a-t-il pas eu ça?», se demande la mère.

Après avoir pris le temps d'encaisser le choc, la famille Major-Labelle, aidée du cabinet d'avocats spécialisé en affaires médicales Ménard-Martin, a décidé d'intenter une poursuite «pour informer les gens de ce qu'est la cardiomyopathie». Des 420 000$ demandés, 250 000$ visent à indemniser le père, la mère et le frère de la victime pour la douleur et les souffrances engendrées par la mort.

Au moment de mettre sous presse, la directrice du service des communications du CSSS n'avait pas répondu à notre demande d'entrevue.