La mère d'une jeune femme qui dit avoir été agressée sexuellement par son beau-père au début de l'adolescence est prête à tout pour éviter de témoigner au procès de son conjoint. Elle préfère être incarcérée plutôt que de révéler les aveux que lui aurait faits l'homme avec qui elle partage toujours sa vie. Malgré une citation à comparaître livrée en mains propres par un policier, qui l'obligeait à se présenter au tribunal, la mère brillait par son absence, hier.

Par conséquent, à la suggestion de la poursuite, la juge a lancé un mandat d'arrêt contre la mère. Elle est un témoin crucial en raison des aveux recueillis, a expliqué la juge Geneviève Graton, hier, au palais de justice de Montréal.

La plaignante, aujourd'hui âgée de 28 ans, affirme que son beau-père est entré dans sa chambre un soir du mois d'août 1997 pour lui faire des attouchements. Elle avait 13 ans. Le lendemain, il lui aurait écrit une lettre dans laquelle il exprimait ses regrets et lui demandait de ne rien dire à sa mère. L'adolescente s'était réfugiée chez sa soeur qui s'est empressée de téléphoner au beau-père. «Moi, ça pouvait passer, mais ma petite soeur, ça ne passera pas», lui a-t-elle dit. Plus tard ce jour-là, l'adolescente de 13 ans est allée récupérer des vêtements chez sa mère et son beau-père. Ils pleuraient tous les deux, assis à la table de la cuisine. Elle a entendu son beau-père dire qu'il n'«aurait jamais dû faire ça», a-t-elle dit, hier, au procès. Dans la semaine suivante, sa mère l'a implorée de ne pas porter plainte à la police. «Pour ma mère, c'était banal, pardonnable», a-t-elle raconté. La jeune femme a porté plainte 12 ans plus tard, en 2009. «Mon beau-père travaille dans un hôpital pour enfants. J'ai pensé à mes propres enfants. J'avais peur qu'il fasse d'autres victimes», a-t-elle ajouté.

Contre-interrogée par la défense, la jeune femme a admis avoir envoyé une mise en demeure à sa mère et à son beau-père leur demandant de lui verser 175 000$, sinon elle porterait plainte à la police.

À son tour de témoigner, la lieutenante-détective Caroline Cournoyer, de la police de Montréal, a raconté sa première rencontre avec la mère de la victime. La mère lui a confié qu'elle avait reçu des aveux mais qu'elle avait pardonné à son conjoint, «un homme d'une grande bonté». Elle a également dit préférer avoir un dossier criminel plutôt que de témoigner.