Un résident en médecine qui a perdu sa licence parce qu'il consommait des narcotiques subtilisés à l'hôpital vient de s'adresser à la Cour supérieure dans l'espoir de faire réviser la décision du Collège des médecins. La preuve a été mal évaluée, allègue Philippe Guèvremont, qui se dit en bonne voie de guérir de sa dépendance.

Un résident en médecine qui a perdu sa licence parce qu'il consommait des narcotiques subtilisés à l'hôpital vient de s'adresser à la Cour supérieure dans l'espoir de faire réviser la décision du Collège des médecins. La preuve a été mal évaluée, allègue Philippe Guèvremont, qui se dit en bonne voie de guérir de sa dépendance.

M. Guèvremont, diplômé en médecine de l'Université McGill, aspire à être chirurgien. En juillet 2010, il a d'ailleurs entrepris sa résidence dans ce domaine. Cette résidence, au cours de laquelle l'étudiant traite des patients sous la supervision de médecins, devait durer cinq ans. Les ambitions de M. Guèvremont se sont effondrées le 2 février dernier quand, après examen de son cas, le comité de direction du Collège des médecins a décidé de lui retirer son certificat d'immatriculation, essentiel pour poursuivre ses études. En agissant ainsi, le Collège «a mis un terme à sa carrière de médecin, non seulement au Québec, mais aussi à l'étranger», signale M. Guèvremont dans son recours judiciaire.

Dépendance fulgurante

La dépendance de M. Guèvremont se serait développée de façon fulgurante, à partir de janvier 2011, selon les explications contenues dans sa requête. Après s'être blessé à une cheville en faisant du sport, il soutient qu'il n'arrivait pas à guérir sa blessure avec des médicaments usuels. Celui qui faisait sa résidence en chirurgie thoracique a alors eu «la mauvaise idée de subtiliser une petite quantité de Dilaudid destinée aux rebuts, qu'il s'administrait lui-même à la maison», peut-on lire dans les documents.

M.Guèvremont affirme que cette drogue a fini par guérir sa blessure. Mais elle a aussi créé chez lui une accoutumance. Pour l'assouvir, il a continué à voler des narcotiques «destinés aux rebuts», jusqu'en avril. À partir de ce moment, M. Guèvremont raconte avoir tenté de se sevrer lui-même en prenant du Naltrexon. Mais l'envie de consommer des narcotiques est restée.

Le 10 mai dernier, entre deux interventions en salle d'opération, M. Guèvremont a volé de nouveau des narcotiques. Il s'est fait prendre, a avoué ses torts et fait part de sa dépendance à ses supérieurs. Suspendu sur-le-champ, il a attendu l'arrivée des policiers, avec qui il a collaboré. Aucune accusation n'a été portée contre lui. Dès le lendemain, par l'entremise du programme d'aide aux médecins du Québec, il a entrepris une cure de désintoxication à la clinique Nouveau Départ.

Rechute

Le 8 août, M. Guèvremont a toutefois fait une rechute. Lorsqu'il se trouvait à l'hôpital comme patient, il a consommé un «reste d'opiacés destiné aux rebuts». Honteux, il soutient en avoir fait part à son médecin dès le lendemain.

Depuis, il affirme qu'il n'a jamais touché de nouveau à un narcotique, et assure avoir réussi tous les tests de dépistage. En octobre dernier, la syndic adjointe, la pédiatre Isabelle Amyot, a recommandé au Collège des médecins de retirer le certificat d'immatriculation de M. Guèvremont. Elle trouvait que la maladie était encore «très active avec rechute précoce». Elle a aussi relevé le peu d'autocritique de M. Guèvremont, et une «manipulation de la vérité» pour certains faits. Le médecin traitant de M. Guèvremont estimait au contraire que le pronostic était très bon. Un psychiatre spécialisé en toxicomanie était du même avis. Ces derniers ont recommandé la poursuite de la formation postdoctorale.

Le 26 janvier, M. Guèvremont a été entendu par le comité de direction du syndic. La décision négative à son endroit a été rendue une semaine plus tard. On jugeait que son comportement pourrait menacer la sécurité et le bien-être des patients.

M. Guèvremont trouve cela injuste. Le Collège n'a pas tenu compte de toute la preuve, et sa décision a été rendue sur des motifs illégaux, croit-il.

Deux cas en 10 ans

Au Collège des médecins, on n'a pu commenter cette affaire, selon la porte-parole, Leslie Labranche. Ce genre de situation arrive toutefois très rarement, selon Mme Labranche. Au cours des 10 dernières années, seulement deux résidents en médecine (dont M. Guèvremont) ont perdu leur certificat d'immatriculation pour consommation de drogue. En ce qui concerne les médecins, depuis 20 ans, seulement trois ont comparu pour usage personnel de drogue.