Un couple de Longueuil condamné pour avoir brutalisé des enfants lourdement handicapés dont il avait la garde évitera sans doute la prison.

Au terme d'un procès de six jours, en septembre dernier, Manon Dauphinais a été reconnue coupable de voies de fait contre trois jeunes pensionnaires. Son conjoint, Claude Bertrand, a été reconnu coupable de la même chose sur un quatrième enfant.

Manon Dauphinais, 56 ans, est orthopédagogue de formation. Elle a d'ailleurs reçu en 2002 la médaille d'argent de l'Ordre du mérite de la Fédération des commissions scolaires pour services rendus à l'éducation au Québec. Son mari, âgé de 58 ans, était représentant de commerce. Retraité, il aidait sa femme à s'occuper des enfants. Le couple est devenu famille d'accueil en 1994 et «ressource intermédiaire» en 2001. En vertu d'un contrat avec le Centre de réadaptation en déficience intellectuelle de la Montérégie, le couple hébergeait neuf personnes, dont quatre enfants.

Hier, la Couronne a réclamé une peine de six à neuf mois d'emprisonnement à purger dans la collectivité dans le cas de Mme Dauphinais. Me Julie Laborde a également suggéré que l'accusée accomplisse des travaux communautaires et qu'elle n'occupe plus d'emploi impliquant la supervision de mineurs. La défense a plutôt suggéré un sursis jumelé à une probation de deux ans. Quant à M. Bertrand, la poursuite suggère des travaux communautaires et la défense, l'absolution. La peine sera prononcée le 20 décembre.

Les faits se sont déroulés entre le 4 mai et le 1er octobre 2007. La première victime, un autiste de 10 ans, était fascinée par les ventilateurs. Un jour où il était trop près de l'appareil, Mme Dauphinais l'a saisi des deux mains par le cou et lui a approché la tête du ventilateur en criant qu'il n'avait pas le droit d'y toucher. Une jeune employée a été témoin de la scène. Elle a aussi vu l'accusée secouer un enfant âgé de 9 ans pour qu'il cesse de crier. Cet enfant, atteint d'une déficience intellectuelle profonde, ne s'exprime que par des pleurs et des cris.

Des témoignages troublants

Une autre employée a été témoin d'autres brutalités de l'accusée contre deux enfants. Elle a aussi vu Claude Bertrand saisir un enfant par le cou et le secouer «deux ou trois fois». Enfin, une autre employée a dit que l'ambiance de travail était «tendue» et que ses patrons «criaient souvent». Elle a vu des bleus sur le corps d'un enfant, mais n'a jamais été témoin d'incidents de violence.

Aux yeux des autorités, «il ne fait aucun doute» que le couple gérait cette ressource «de façon satisfaisante», a constaté le juge Provost. Aucun doute, non plus, que plusieurs enfants y ont accompli des progrès remarquables. Toutefois, selon le juge, «la preuve démontre hors de tout doute raisonnable que l'application de la force est survenue sans que les victimes y consentent». Au procès, les accusés ont présenté une défense dite du «droit de correction». Le magistrat a néanmoins rejeté la défense du «droit de correction», puisque le couple n'agissait pas en vertu d'une délégation d'autorité parentale.