L'entrepreneur en excavation Sylvain Fournier, qui a failli périr en même temps qu'un de ses employés au cours d'un effondrement dans une tranchée, le 3 avril 2012, sera accusé de négligence criminelle ayant causé la mort.

L'automne dernier, au terme de son enquête, la Commission de la santé et de la sécurité du travail (CSST) avait sévèrement blâmé l'entrepreneur de Lachine pour l'accident de travail qui a coûté la vie à Gilles Lévesque.

À 12h45 ce jour-là, quelques heures après le début des travaux, M. Lévesque, employé de S. Fournier excavation, travaillait dans une tranchée pour changer le drain d'égout d'une maison de la 54e Avenue, à Lachine, quand la paroi s'est effondrée. L'homme d'une cinquantaine d'années a été enseveli. En voulant porter secours à son employé, Sylvain Fournier aurait provoqué un second éboulement. Il a lui aussi été enseveli sous la terre, les blocs d'asphalte et de béton, mais moins profondément. Il a pu appeler à l'aide avec son téléphone portable.

Dans son rapport rendu public en octobre, la CSST a relevé que M. Fournier a appelé ses deux frères, ses collègues, puis sa conjointe. C'est elle qui a composé le 9-1-1.

Quand les pompiers sont arrivés, un des frères de M. Fournier tentait de libérer ce dernier avec une pelle mécanique. Les secouristes lui ont ordonné d'arrêter, car la tranchée n'était pas sécurisée. Les sapeurs ont étançonné la tranchée pour éviter un autre affaissement, avant de libérer M. Fournier, à 14h. Celui-ci était gravement blessé aux jambes. Quant à M. Lévesque, il a été sorti à 16h45. Sa mort a été constatée sur place.

Il ne savait pas

La CSST a conclu que l'entrepreneur avait contrevenu aux règles de sécurité, notamment en n'étançonnant pas la tranchée et en déposant le déblai trop près du bord.

Lorsque La Presse a tenté de contacter M. Fournier, cette semaine, celui-ci était au travail et ignorait qu'une accusation criminelle était déposée contre lui.

C'est ce qu'a fait valoir sa conjointe, qui ne s'attendait pas à cela non plus. L'avocat qui représente l'entreprise devant la CSST, Me Yacine Agnaou, n'était pas plus au courant. Il s'est dit très étonné que l'affaire se transforme en poursuite criminelle. Il a indiqué que, dans la foulée de cette affaire, «la compagnie» a plaidé coupable à une infraction en vertu de la Loi de la CSST, et que des discussions étaient en cours pour le paiement de l'amende. La CSST réclame presque le maximum, soit 57 293$, ce que Me Agnaou conteste.

Selon Me Agnaou, son client éprouve encore une «peine personnelle très forte», d'autant plus que M. Lévesque était son meilleur ami.

La date de comparution de M. Fournier n'avait pas encore été fixée, hier. Le ministère public a décidé de procéder par mandat d'arrêt visé. Ce procédé fait en sorte que la personne est arrêtée et mise en liberté sous promesse de comparaître.