Les membres de la famille Baker se sont associés à plusieurs organisations charitables pour vendre leurs tablettes de chocolat. Et aujourd'hui, une entreprise proche de la famille, Chocolat Unik, continue de faire des affaires un peu partout au Québec.

Chocolat Unik est née en septembre 2005 dans la foulée des multiples faillites de la famille Baker. En 2006, a constaté le syndic de faillite, Unik a utilisé un numéro de téléphone commun et une adresse commune aux entreprises de chocolat de la famille Baker.

Michael Baker a travaillé chez Unik de 2005 à 2010 et son fils Glenn Baker y travaille encore, selon nos vérifications. Toutefois, ni l'un ni l'autre ne sont inscrits comme actionnaires au registre des entreprises. Le président et seul actionnaire d'Unik est Sylvain Daneau, qui était l'un des six employés de Chocolats Cinq Étoiles en juin 2005 lorsque cette entreprise au coeur de la fraude a été mise en faillite.

Controverse dans le Bas-Saint-Laurent

Aujourd'hui, Unik continue de solliciter des oeuvres de charité pour vendre ses tablettes de chocolat. Elle appose leurs noms sur des boîtes remplies de tablettes de toutes sortes et dépose ces boîtes dans des commerces, comme des nettoyeurs ou des centres d'entretien d'automobiles.

À la fin du mois d'octobre, les pratiques d'affaires de Chocolat Unik ont soulevé la controverse dans le Bas-Saint-Laurent. Unik vendait ses tablettes dans les commerces de la région au bénéfice d'un organisme appelé Fondation d'aide aux handicapés du Québec (FAHQ).

Or, le vice-président de la FAHQ est nul autre que Sylvain Daneau, patron d'Unik. Un quotidien de la région, Infodimanche, a fait enquête et a constaté que la Fondation n'a aucunement l'appui des organismes de la région.

La Fédération des personnes handicapées de la région trouve l'organisation suspecte. «Il va où, cet argent? Chose certaine, il ne va pas aux organismes de la région de KRTB [Kamouraska-Rivière-du-Loup-Témiscouata-Les-Basques], a déclaré Cyd Lamirande, coordonnatrice de la Fédération, à Infodimanche.

Après le reportage du 26 octobre d'Infodimanche, les commerçants de la région ont majoritairement retiré les boîtes de leurs comptoirs. Des boîtes sont toutefois encore présentes dans d'autres régions, selon nos informations.

Joint au téléphone, le directeur des dons de la Fondation d'aide aux handicapés du Québec (FAHQ), Mustapha Salmi, affirme qu'il n'a rien à voir avec la famille Baker. «Je ne discute pas de ces choses avec eux. J'ai appris les récentes accusations contre la famille Baker dans les journaux», dit-il.

En moyenne, Unik verse 30 000 $ par an à la Fondation, soit l'équivalent de 10 cents par tablette de chocolat, vendue 2 $, précise-t-il. Le reste va à l'achat du chocolat, aux pertes et à l'administration, explique M. Salmi, qui touche «une indemnité de 350 $ par mois» de la Fondation.

En plus des 30 000 $ d'Unik, la Fondation affirme redonner aux gens dans le besoin le matériel d'occasion qui lui est acheminé, comme des cannes et des déambulateurs.

Une autre fondation, tout à fait légitime, a eu maille à partir avec Unik: la Fondation québécoise pour les enfants malades du coeur. Entre 2010 et la fin de 2011, la fondation a accepté de voir son nom apposé sur les boîtes d'Unik moyennant rétribution. Mal lui en prit.

«Unik nous devait des sous, mais elle ne nous ont jamais payés. Et quand on a vérifié le contrat, il n'y avait aucune façon d'en sortir. C'est une arnaque, cette affaire-là», nous a déclaré Richard Quesnel, directeur général de la Fondation.

Le modus operandi d'Unik ressemble à celui des entreprises de la famille Baker. En 2001, l'entreprise des Baker, Chocolat 3 Étoiles, avait conclu des ententes avec les fondations Jardin des enfants disparus, de la région de Montréal, et Canadian Association of the Blind, en Ontario. Il était alors question d'un million de tablettes de chocolat.

Or, ces deux associations logeaient dans des immeubles de l'organisation Baker, selon des documents du syndic Raymond Chabot déposés en cour.

En 2002, une enquête du Toronto Star a dénoncé ces deux fondations. Selon le Star, la Canadian Association of the Blind a recueilli 1,5 million de dollars entre 1999 et 2002. De cette somme, seulement 10 912 $ ont réellement servi à faire la charité. Le reste a été empoché par les collecteurs de fonds et l'administration, toujours selon le Star.

Cette association, qu'il ne faut pas confondre avec la Canadian Federation of the Blind, a perdu son statut de fondation attribuée par Revenu Canada à la fin de 2002.

Unik réplique

Joint au téléphone, le président d'Unik, Sylvain Daneau, affirme qu'il n'a rien à voir avec les affaires de la famille Baker. «Je ne veux pas être mêlé à quelque chose qui ne me regarde pas», dit M. Daneau, qui n'a pas été accusé par la Gendarmerie royale du Canada.

Il reconnaît avoir travaillé pour Cinq Étoiles, mais ne se rappelle pas précisément quand ni pendant combien de temps - «peut-être six mois». Le syndic affirme qu'il faisait partie des six employés congédiés au moment de la faillite, une chose dont M. Daneau ne se souvient pas. Il soutient avoir rompu en bons termes ses relations avec la Fondation pour les enfants malades du coeur.

Sylvain Daneau affirme qu'il écoule huit millions de tablettes de chocolat par année, crée des emplois et vient en aide à des organismes charitables. «Allez-vous l'écrire, ça?», a-t-il dit.