Après les drogues, les explosifs et certaines maladies, voilà que les animaux pourraient par la bande aider à dépister des cas de violence conjugale. Parce que si le chien est battu, il y a risque que sa maîtresse et les enfants le soient aussi.

C'est ce que rappelle l'Ordre des médecins vétérinaires du Québec qui, dans une publication récente, consacre tout un dossier à la violence en établissant un lien très clair entre celle faite aux animaux et celle faite aux humains.

Les données sont troublantes. Selon un sondage réalisé en 2000 par la SPCA ontarienne auprès de 111 victimes de violence familiale qui se trouvaient dans un refuge pour femmes battues, l'animal domestique avait aussi été menacé, maltraité ou tué dans la moitié des cas. Par ailleurs, pas moins de 43% de ces personnes avaient tardé à quitter la maison parce qu'elles étaient inquiètes de laisser leur animal derrière elles.

Un autre sondage réalisé il y a une dizaine d'années auprès de 100 femmes dans des refuges pour femmes battues de Calgary a par ailleurs révélé que 56% des animaux de ces femmes avaient aussi été menacés, blessés ou tués. Le quart d'entre elles disaient aussi avoir retardé leur départ de la maison par souci du bien-être de leur animal de compagnie.

Au Québec, «de nombreuses femmes vont retarder leur départ de leur milieu et le moment où elles porteront plainte par crainte de ce qui pourrait arriver à leur animal, dit le Dr Joël Bergeron, président de l'Ordre des médecins vétérinaires. L'animal devient un outil de chantage, de marchandage, de manipulation, et ce, tant envers la conjointe qu'envers les enfants.»

Comme l'écrit Debbie Stoewen, doctorante en médecine vétérinaire, cela n'est pas surprenant dans la mesure où la grande majorité des familles considèrent leur animal comme un membre à part entière du noyau familial. Aussi incite-t-elle les vétérinaires québécois à participer au programme canadien SafePet. Par ce programme, les vétérinaires, en lien avec les refuges pour femmes, offrent un foyer temporaire et des soins aux animaux de compagnie des femmes désireuses de quitter un conjoint violent. L'idée du programme: contourner un obstacle important en offrant la «tranquillité d'esprit» aux femmes et en les assurant «que chaque membre de la famille sera en sécurité, y compris les animaux favoris».

Ruth Pilote, agente de planification, de programmation et de recherche à l'Institut national de santé publique du Québec, rappelle pour sa part dans le journal de l'Ordre des médecins vétérinaires que ces professionnels mis au courant de violence conjugale se doivent «d'assurer la sécurité des personnes et des animaux» et «de faire un signalement à la DPJ en toute confidentialité s'il y a des enfants dans le ménage».