Québec serre la vis aux universités. Désormais, tout changement aux salaires et aux conditions de travail de leurs dirigeants devra être approuvé par le gouvernement.

Les hausses salariales, mais aussi l'augmentation du coût des conditions de travail, devront respecter les taux en vigueur dans la fonction publique, par exemple. Québec amputera les subventions d'une université si elle viole les règles.

Le 26 mars, le Conseil du Trésor a adopté une nouvelle règle budgétaire qui était en préparation depuis l'automne au bureau du ministre de l'Enseignement supérieur, Pierre Duchesne. Cette règle, obtenue par La Presse, restreint l'autonomie des universités dans la fixation des salaires et des conditions de travail de leurs dirigeants. Les manchettes sur les traitements royaux des recteurs ont poussé le gouvernement à prendre le taureau par les cornes.

La règle budgétaire donnera un coup de frein à la croissance de la masse salariale de la direction des universités, s'attend-on à Québec. Elle permettra un «contrôle plus adéquat» de la rémunération. Ce sera un outil pour «ne pas autoriser une croissance ou une augmentation qui serait jugée déraisonnable ou inadéquate», ajoute une source gouvernementale.

La règle budgétaire vise les membres de la «direction supérieure» des universités, c'est-à-dire les recteurs, vice-recteurs et doyens. Elle ne remet pas en question leur rémunération actuelle. Elle encadre plutôt sa croissance.

«Avant d'adopter ou de modifier une politique, un règlement ou une disposition particulière concernant la rémunération et les conditions de travail d'un ou des membres du personnel de direction supérieure [...], chaque établissement doit soumettre à l'approbation du ministre les paramètres de rémunération globale et de conditions de travail», stipule la règle budgétaire. Elle concerne les salaires, mais également «les avantages sociaux et les autres éléments de traitement imposables», notamment les assurances, les allocations pour le logement et la location ou l'achat d'une voiture, les programmes supplémentaires de retraite, les indemnités de séparation, a précisé le cabinet du ministre Duchesne.

La règle budgétaire va donc plus loin que les quelques clauses prévues à la loi 100 qui a été adoptée il y a trois ans en vue de retrouver l'équilibre budgétaire en 2013-2014.

Le gouvernement comme modèle

Toujours selon cette règle, «les taux de croissance de la rémunération globale et des coûts des conditions de travail ne devront pas excéder les taux de croissance de la politique salariale du gouvernement (PSG)». Cette politique correspond aux hausses salariales négociées dans les conventions collectives de la fonction publique. Ainsi, la hausse salariale s'élève à 1,75% pour cette année. L'an dernier, l'augmentation a atteint 1,5% - ce qui inclut la prime de 0,5% versée parce que la croissance économique a été supérieure aux prévisions. Entre 2002 et 2011, les salaires ont crû en moyenne de 1,4% par année en vertu de la PSG.

Pendant ce temps, la masse salariale de la direction des universités a augmenté de 6,8% par an, passant de 151,7 millions à 225,5 millions de 2002 à 2008. Notons qu'une partie de cette augmentation - on ignore laquelle précisément - est attribuable à l'ajout de personnel.

La règle budgétaire précise que l'université doit présenter au gouvernement «les impacts budgétaires à court et à moyen terme» de ses politiques de rémunération globale.

Une fois approuvée avec ou sans modification par le ministre, la politique de rémunération «lie l'établissement qui est tenu de s'y conformer, sous peine de voir sa subvention diminuée de toute somme jugée non conforme aux lignes directrices indiquées dans l'approbation du ministre», ajoute la règle budgétaire. Québec prend la peine d'ajouter que «l'établissement doit faciliter le suivi par le ministère de l'application des politiques et des règlements concernés».

Lorsque le ministre aura approuvé une telle politique, l'université devra recevoir de nouveau son autorisation si elle veut l'amender.

- Avec la collaboration de Serge Laplante