Se rendre à l'école à pied est plus dangereux à Montréal qu'ailleurs au Québec. La proportion de jeunes piétons blessés sur le chemin de l'école est beaucoup plus élevée dans la métropole, indique une étude de l'Institut national de la santé publique.

De 2006 à 2010, des chercheurs ont compilé tous les accidents recensés par la Société de l'assurance automobile du Québec (SAAQ) qui ont impliqué des enfants de 5 à 12 ans aux heures d'entrée et de sortie des classes. Ces données permettent de constater que 313 écoliers québécois sont blessés en moyenne chaque année sur le chemin de l'école, soit près de 2 enfants par jour d'école.

La vaste majorité de ces accidents se solde par des blessures légères. À peine 3,4% provoquent des blessures graves, c'est-à-dire qu'elles nécessitent une hospitalisation. Les collisions sont rarement mortelles: trois enfants ont perdu la vie sur le chemin de l'école de 2006 à 2010, soit dans 0,2% des cas. Deux d'entre eux ont été fauchés pendant qu'ils se rendaient à pied à l'école dans la région de Lanaudière et le troisième est mort en Outaouais à bord d'un véhicule motorisé.

À Montréal, les écoliers risquent surtout d'être heurtés par une voiture lorsqu'ils se rendent à pied à l'école: 325 enfants ont été blessés de cette façon entre 2006 et 2010. Huit d'entre eux ont été blessés gravement et aucun n'est mort.

Les données de la SAAQ démontrent que plus du tiers (35,5%) des accidents impliquant un écolier au Québec sont survenus à Montréal. Pourtant, seulement un petit Québécois sur cinq (22,8%) vit à Montréal.

Cette surreprésentation ne surprend par la chercheuse Marie-Soleil Cloutier, de l'Institut national de recherche scientifique. «Les écoliers de Montréal sont beaucoup plus nombreux à se rendre à pied à l'école, surtout dans les quartiers défavorisés, où l'on constate davantage d'accidents.»

Une étude à laquelle elle a collaboré en 2011 démontre en effet que plus des deux tiers de ces accidents surviennent dans les quartiers pauvres; 1 sur 20 seulement se produit dans les quartiers riches.

Mme Cloutier mène actuellement une autre étude, pour le compte du Service de police de la Ville de Montréal (SPVM), sur le rôle des 600 brigadiers scolaires. Plus de 400 d'entre eux ont répondu à un questionnaire, et la chercheuse en a interviewé plus d'une centaine. «Ce qui m'a frappée, c'est qu'ils disent tous vivre au moins un incident par semaine dans lequel eux ou les enfants derrière eux se font presque heurter par une voiture. Dans certains coins de Montréal, c'est tous les jours», expose-t-elle.

Feux pour piétons

Les nombreux accidents recensés par la SAAQ ne signifient pas pour autant que les brigadiers sont inefficaces, tient à préciser Mme Cloutier. Elle souligne que ceux-ci surveillent principalement les intersections les plus près de l'école, souvent dans un rayon de 200 m. Or, une étude réalisée en décembre 2011 par l'Institut national de la santé publique indique que plus de la moitié des accidents surviennent près de la maison, alors que le quart se produisent en périphérie de l'école.

Fait étonnant, la majorité des brigadiers interrogés par Mme Cloutier se sont montrés défavorables à l'implantation de feux pour piétons. Souvent, ils n'allouent pas aux enfants suffisamment de temps pour traverser complètement la rue. Une fois le temps écoulé, les automobilistes ont tendance à passer même si l'intersection n'est pas complètement libre.

À l'inverse, les brigadiers estiment qu'ils peuvent mieux diriger le passage des enfants, car leur seule présence dissuade les conducteurs d'appuyer sur l'accélérateur. Mme Cloutier souligne toutefois que les feux sont fortement appréciés aux intersections très passantes. C'est d'ailleurs à ces endroits que l'on recense davantage d'accidents.

Les résultats complets de l'étude de Mme Cloutier sur les brigadiers scolaires montréalais doivent être présentés à la conférence mondiale de la recherche sur les transports, en juillet 2013, à Rio de Janeiro, au Brésil.