Dans le stationnement jouxtant la cour de l'école secondaire Gabriel-Le Courtois, la famille Marin grelotte en attendant la sortie des élèves. Maryse Marin déplie une feuille qu'elle montre à d'autres parents. C'est une pétition qui a circulé parmi les élèves, il y a deux ans, contre sa fille Jessica, 15 ans, grande amie de Marjorie Raymond.

«Ceux qui trouvent que Jessica est une voleuse, menteuse, bitch, conne, profiteuse, stooleuse, droguée, manipulatrice et plus encore, signez votre nom en bas.» Près d'une vingtaine de noms s'alignent jusqu'au bas de la page.

«Qu'est-ce qu'avait fait l'école? Rien», dit Mme Marin. Ou si peu, ajoute-t-elle. Pas assez, en tout cas, pour empêcher des élèves de s'en prendre encore à sa fille, il y a 15 jours. «Nous, on voit nos enfants à la maison, dit Maryse Marin. Mais quand ils arrivent à l'école, on ne sait plus ce qui se passe. Est-ce qu'on les écoute suffisamment? Comment les aider si on ne les écoute pas?»

À ses côtés, ses nièces Romane et Coralie, arrivées la veille de Rosemère pour participer à la cérémonie d'envol de ballons à la mémoire de Marjorie Raymond, qui s'est enlevé la vie lundi. Elles ont connu Marjorie lors des visites estivales chez leur cousine. Chacune tient à la main un petit ballon blanc prêt à être lâché dans le ciel, dans une cérémonie des élèves à la mémoire de l'adolescente qui s'est tenue hier matin.

«Il faut toujours qu'il arrive quelque chose pour réaliser qu'on est allé trop loin», soupire Romane. Elles ont elles-mêmes été victimes de violences commises par des jeunes de la région. «Une fille d'ici m'a déjà sauté dessus parce qu'elle était jalouse de moi à cause de mon chum», dit Romane Marin, 16 ans. Sa tante Maryse hoche la tête. «Ils étaient une quinzaine autour d'elle quand on est intervenus», dit-elle.

Manque de surveillants ?

L'intimidation et la violence sont-elles pires à Sainte-Anne-des-Monts qu'ailleurs? Les trois haussent les épaules. Coralie, 13 ans, se demande s'il y a suffisamment de surveillance. «Dans mon école, où il y a seulement deux années de secondaire, il y a quatre surveillants.» «Ici, dit Mme Marin, il n'y en a qu'un seul.»

«Dans toutes les écoles, c'est la même chose. Il y a une petite rencontre avec la direction, puis on donne une suspension à ceux qui ont intimidé quelqu'un, dit Coralie. Mais une suspension, c'est comme des vacances pour eux.»

Et l'intimidation ne se déroule pas qu'à l'école. «Même une fois à la maison, ça se poursuit sur Facebook», rappelle Coralie.

«Mais je crois que ça doit être pire en région, ajoute-t-elle. Parce qu'il y a une seule école secondaire. Chez nous, on peut changer d'école, il y en a plusieurs. Ici, on n'a pas le choix.»

La mère de Marjorie, Chantale Larose, avait d'ailleurs tenté de la changer d'école. «L'été dernier, je lui avais dit qu'elle pourrait aller aux cours pour adultes, a-t-elle expliqué, jeudi, lors d'un entretien. Mais il faut avoir 16 ans. Elle n'a pas pu attendre.»