Des producteurs québécois de vin, de cidre et d'hydromel craignent qu'un changement «radical» et «arbitraire» de position au sein de la Régie des alcools, des courses et des jeux du Québec (RACJQ) ne sonne la fin de leur industrie.

L'Association des vignerons du Québec et 42 producteurs de boissons alcoolique plaident qu'ils ont été injustement écartés de foires, salons et autres festivals qui leur procurent une source importante de revenus. Ils ont déposé, jeudi après-midi, une demande d'injonction à la Cour supérieure pour recouvrer le droit de vendre leurs produits dans les «événements publics» qui ne donnent pas exclusivement dans la promotion de produits agroalimentaires.«Pendant trois mois, on reçoit le citadin chez nous, mais pendant le reste de l'année, on doit aller le rencontrer. C'est un outil indispensable et s'il nous est retiré aujourd'hui comme il en est question, c'est la fin de l'industrie des boissons alcooliques au Québec», a déploré le président de l'Association des vignerons du Québec, Charles-Henri de Coussergues, à la sortie de l'audience sur la requête.

Le litige entre la RACJQ et les producteurs de vin concerne l'émission d'une note rédigée en 1998 par l'ancien président de la RACJQ, Me Ghislain K. Laflamme. Le document visait à préciser le réseau de commercialisation des boissons alcooliques produites de manière artisanale.

Durant plus de 11 ans, les demandeurs ont interprété qu'ils pouvaient non seulement vendre et faire goûter leurs produits dans des marchés publics et foires agricoles, mais aussi dans d'autres événements tels le Salon des Métiers d'art, le Festival Western de Ste-Tite ou le Salon des Artisans de Québec. Selon la requête, de tels événements peuvent représenter près de 25 000$ de ventes, par entreprise.

Or, les vignerons allèguent que la RACJQ a changé sa propre interprétation de la note en décembre 2009 en imposant de nouvelles conditions «frivoles» et «impossibles à atteindre» à tous les détenteurs de permis de production artisanale. Dorénavant, les producteurs doivent par exemple fournir la liste du nom de tous exposants et produits présentés lors d'un événement ainsi que le plan d'aménagement des tables et kiosques. Ils doivent également prouver que l'endroit ne détient pas de permis d'alcool.

«Ce que l'on conteste depuis 20 ans c'est que la Régie n'a pas la compétence de gérer la mise en marché d'un produit agricole», a affirmé Charles-Henri de Coussergues.

«D'un côté, nous avons Transformation agroalimentaire Québec qui a mis 9 millions de dollars dans cette industrie depuis trois ans pour lui permettre d'atteindre des niveaux internationaux de qualité et la Financière agricole du Québec qui a prêté de l'argent pour leurs hypothèques. De l'autre, il y a une partie du même gouvernement qui ne comprend absolument rien», a ajouté le procureur des demandeurs, Me Jean-Pierre Bélisle. «Est-ce qu'une échelle administrative qui ne comprend rien va démolir ce que tous les autres ont fait avant? Ils sont littéralement en train de saborder les efforts de tous les autres intervenants du gouvernement du Québec.»

De son côté, l'avocate de la RACJQ, Martine Veilleux, a plaidé que l'organisme gouvernemental devait privilégier l'intérêt du public sur l'intérêt privé. Elle a également ajouté que la vente sur les lieux de fabrication, à la Société des alcools du Québec (SAQ) et par exportation n'étaient pas visée dans le litige.

La juge Hélène Langlois, qui a entendu le dossier, a indiqué qu'elle rendrait sa décision au début de la semaine prochaine.