Le chef intérimaire du Parti libéral du Québec (PLQ), Pierre Arcand, s'est distancié lundi de son directeur de campagne électorale, Alexandre Taillefer, alors que celui-ci enjoignait les libéraux à considérer un compromis dans le dossier des signes religieux.

L'ancien Dragon, propriétaire de Téo Taxi et du magazine L'actualité - qui envisage maintenant de succéder à Philippe Couillard à la tête du PLQ - a invité les libéraux à songer à se ranger derrière le compromis Bouchard-Taylor afin de renouer avec les francophones.

« Écoutez, il y a certainement un questionnement à avoir par rapport à la question des signes religieux, définitivement », a déclaré M. Taillefer en marge de la cérémonie d'assermentation des députés libéraux.

« On a aujourd'hui abordé la question de Bouchard-Taylor. Est-ce qu'on doit arriver à un compromis ? C'est quelque chose qui va être sur la table, mais ce n'est certainement pas à moi d'en juger », a-t-il ajouté.

La reconstruction du PLQ ne passera pas par la mise au rancart de ses valeurs fondamentales, a immédiatement répliqué M. Arcand.

« M. Taillefer parle en son nom personnel, il ne parle pas au nom de notre formation politique, a-t-il tranché. Notre formation politique, le caucus a une opinion. Il a le droit d'avoir l'opinion qu'il veut sur cette question-là. »

Selon le député de D'Arcy-McGee, David Birnbaum, il est de toute façon beaucoup trop tôt pour faire un lien entre la cuisante défaite électorale du PLQ et sa position historique sur la laïcité et les signes religieux.

Il a à son tour laissé entendre que M. Taillefer faisait bande à part. « Je crois qu'il y a une solidarité au sein de notre nouveau caucus. Il y a en un qui s'est prononcé, à ma lecture, qui n'est pas au caucus, de façon un peu précipitée », a-t-il affirmé.

M. Birnbaum a ajouté que la position de la Coalition avenir Québec (CAQ) d'interdire le port de signes religieux aux employés de l'État en position d'autorité, incluant les enseignants, inquiète la communauté juive.

Le rapport Bouchard-Taylor de 2008 préconisait l'interdiction des signes religieux pour les personnes en position d'autorité contraignante, tels les juges, policiers et gardiens de prison, mais pas pour les enseignants.

La loi 62, adoptée par le précédent gouvernement libéral, prévoit que tous les services publics au Québec doivent être donnés et reçus à visage découvert. Cette pièce législative fait toujours l'objet d'une contestation judiciaire.

« Nous, on croit que le compromis c'était le projet de loi [62] », a déclaré la députée libérale dans Saint-Laurent, Marwah Rizqy.

« Après analyse [de la jurisprudence], on se rend compte que c'est le projet de loi où on peut aller le plus loin pour d'une part protéger les droits et libertés mais aussi entendre les enjeux de la population », a-t-elle renchéri.

La discussion est donc lancée au PLQ, avec, de surcroît, les commentaires d'Antoine Dionne-Charest. Le fils de Jean Charest a écrit dans une lettre ouverte lundi qu'on devait cesser de traiter la Coalition avenir Québec (CAQ) d'intolérante et de raciste, car cela nuit à la sérénité du débat.

Prestation de serment

Les 29 députés libéraux ont prêté serment, lundi, dans le chic Salon rouge de l'Assemblée nationale.

Le tiers d'entre eux ont opté pour un serment bilingue, tandis que le député dans Nelligan, Monsef Derraji, a prononcé la formule en posant la main gauche sur le Coran.

Certains députés étaient particulièrement émus. C'était le cas entre autres des recrues Jennifer Maccarone (Westmount-Saint-Louis) et Paule Robitaille (Bourassa-Sauvé), qui avaient la larme à l'oeil.

Fait à noter : pour la première fois de l'histoire, le caucus libéral est majoritairement féminin. Il est composé de 16 femmes et de 13 hommes.

Journée émouvante aussi pour l'ancien ministre Geoffrey Kelley, qui passe le flambeau à son fils Gregory dans la circonscription de Jacques-Cartier. Il arborait d'ailleurs une photo de son assermentation en 1998, un jeune Gregory de 13 ans posant fièrement à ses côtés.

Par ailleurs, les convives ont réservé un accueil particulièrement chaleureux à l'ancien ministre des Finances, Carlos Leitão, qui a longuement été ovationné. Son collègue dans Pontiac, André Fortin, a également eu droit à des applaudissements nourris.

Le PLQ a fait élire 32 députés aux dernières élections générales, alors qu'il en comptait 68 à la dissolution de l'Assemblée nationale, le 23 août dernier.

Le parti a perdu trois députés depuis le scrutin, en raison de la démission de Philippe Couillard à titre de chef du PLQ et député de Roberval, de l'expulsion du caucus libéral du député de Chomedey, Guy Ouellette, et du dépouillement judiciaire dans Gaspé.

Cette semaine sera chargée : mardi, ce sera au tour des 74 députés de la Coalition avenir Québec (CAQ) de prêter serment ; mercredi, aux 10 de Québec solidaire (QS) ; et vendredi, aux 10 élus du Parti québécois (PQ).

Mentionnons que le premier ministre élu François Legault fera connaître la composition de son conseil des ministres le jeudi 18 octobre.