Le Parti québécois (PQ) a voté contre le principe du projet de loi 400, qui permettrait à La Presse de se transformer en organisme à but non lucratif (OBNL).

Trop de questions subsistent, a indiqué, lundi, le leader parlementaire du PQ, Pascal Bérubé, pour justifier sa décision. L'opposition officielle pourrait toutefois choisir de voter pour le projet de loi au terme de l'étude article par article qui s'entame cette semaine à l'Assemblée nationale.

Le propriétaire actuel de La Presse, Power Corporation, veut se départir du média et invoque l'urgence d'agir, mais doit d'abord obtenir l'accord unanime des députés pour abroger une vieille loi avant la fin des travaux parlementaires le 15 juin.

Lundi, M. Bérubé a déploré l'aspect « précipité » du projet de loi, et le « précédent » qu'il pourrait créer, en rappelant également tout le respect qu'il voue aux artisans de l'information.

« On sait quelle est notre responsabilité, on sait quels sont les enjeux pour La Presse, pour les journalistes, pour leurs familles, pour l'avenir », a-t-il déclaré de son siège au Salon bleu.

Le PQ demande des garanties sur l'indépendance éditoriale de La Presse, mais la direction a laissé entendre qu'elle voulait conserver sa position éditoriale fédéraliste.

Au chapitre de la gouvernance, le parti souverainiste s'oppose à ce que le président de La Presse, Pierre-Elliott Levasseur, nomme les membres du conseil d'administration du futur OBNL. « Si Power Corporation et la famille Desmarais veulent rompre ce lien à travers un legs de 50 millions de dollars, [...] il faut que la rupture soit réelle », a soutenu M. Bérubé.

« Est-ce qu'on peut garantir des places aux journalistes sur le conseil d'administration ? Aux lecteurs qui sont à la base de ce journal-là ? [...] On n'a pas eu de garanties et on nous a dit qu'on allait négocier, et même à la rigueur, certaines personnes nous ont dit que ce n'était pas de nos affaires. »

« Ce n'était pas une bonne idée de nous dire ça », a-t-il laissé tomber.

Martine Ouellet proposera des amendements

La députée indépendante Martine Ouellet a également voté contre le principe du projet de loi 400, lundi. Elle n'a soulevé que des objections et a assuré avoir de nombreux amendements à proposer.

Elle a laissé entendre que La Presse perdrait 25 millions par année, selon ses sources.

« Comment, s'ils n'étaient pas rentables avant, vont-ils être plus rentables en se transformant en OBNL ? a-t-elle demandé. L'OBNL n'a pas de poches profondes, [...] donc les emplois seront encore plus précaires après qu'avant. Ça va complètement à l'encontre de notre objectif de maintenir les emplois des journalistes. »

Si Power Corporation avait présenté son plan d'affaires à l'émission Dans l'oeil du dragon, « il n'y a pas un dragon qui aurait investi, a-t-elle martelé. Ça aurait été un échec monumental. Ils nous demandent à nous de dire "OK" et passer la loi pour qu'après ça, ils puissent aller chercher l'argent des contribuables. »

La semaine dernière, la direction et les syndicats de La Presse ont pourtant plaidé en faveur du changement de structure. Ils ont demandé à l'Assemblée nationale de ne pas s'ingérer dans les politiques rédactionnelles du média, tout comme la Fédération professionnelle des journalistes du Québec (FPJQ).

Les dirigeants de La Presse ont rappelé que Google et Facebook accaparaient maintenant 80 % des revenus publicitaires au Canada et qu'ils ne peuvent attendre une année de plus pour passer au statut d'OBNL. Ce nouveau statut pourrait permettre ultimement d'obtenir des crédits d'impôt fédéraux sur la masse salariale.

Par ailleurs, Power Corporation s'est engagée à ce que tous les avantages et bénéfices que touchent aujourd'hui les retraités, sans aucune exception, soient respectés dans la nouvelle structure.

Le gouvernement libéral, la Coalition avenir Québec (CAQ) et Québec solidaire (QS) ont fait savoir lundi qu'ils étaient favorables aux changements demandés par La Presse.

Rappelons que la société mère de La Presse détient une participation dans La Presse canadienne dans le cadre d'une entente conjointe avec une filiale du quotidien The Globe and Mail et l'éditeur Torstar.