Gratuité scolaire pour les moins fortunés, interdiction de signes religieux à certains fonctionnaires, baisse des tarifs de garderie. Un gouvernement du Parti québécois (PQ) effacerait plusieurs pans de l'héritage libéral, révèle la plateforme électorale présentée à Drummondville dimanche. Un document qui ne reprend pas les dispositions du programme péquiste sur le financement des cégeps anglophones.

Cégeps anglophones

Le programme du PQ prévoit que le financement des cégeps anglophones sera « graduellement aligné sur le poids démographique proportionnel de cette communauté ». Cela aurait pour effet de couper les vivres au réseau, puisqu'il est fréquenté par de nombreux francophones. Cet engagement découle d'une résolution adoptée en septembre dernier au congrès du PQ. Mais on n'en trouve aucune trace dans la plateforme électorale présentée dimanche. Il n'a pas été retenu par la commission chargée d'élaborer le document d'une cinquantaine de pages.

Anglais au cégep

Le chef péquiste, Jean-François Lisée, a assuré dimanche qu'il adhérait toujours à la position adoptée par les membres l'an dernier. Mais un gouvernement péquiste ne couperait pas directement les vivres aux cégeps anglophones, a-t-il expliqué. Sa stratégie serait plutôt de « réorienter l'offre » en proposant un « parcours enrichi en anglais » dans les cégeps francophones. « On veut faire en sorte que les cégeps francophones soient beaucoup plus attractifs en donnant un meilleur parcours d'apprentissage de l'anglais. Et ainsi, on veut attirer des gens qui, actuellement, vont au cégep anglophone et vont venir au cégep francophone. Ça va rééquilibrer le financement. »

« Gratuité scolaire »

Un gouvernement péquiste instaurerait graduellement la « gratuité scolaire » à l'université. M. Lisée veut faire en sorte que les droits de scolarité soient réduits à zéro, d'abord pour les plus démunis, ensuite pour la classe moyenne puis, éventuellement, pour tous les étudiants. « Notre objectif, c'est que dans le premier mandat, on aille jusqu'au milieu de la classe moyenne, a expliqué M. Lisée. C'est-à-dire que pour tous les enfants de milieu modeste, classe moyenne inférieure jusqu'au milieu de la classe moyenne, les droits de scolarité soient à zéro. »

Signes religieux

La plateforme prévoit la relance du débat sur la laïcité. Le PQ s'engage à baliser dans la Charte des droits et libertés les paramètres entourant les accommodements religieux. Il compte aussi interdire le port de signes religieux aux fonctionnaires avec un pouvoir de contrainte (juges, policiers, etc.), tel que le recommandait la commission Bouchard-Taylor. L'interdiction s'étendrait aux enseignants et aux éducatrices en garderie. Un droit acquis s'appliquerait à ceux et celles qui sont déjà employés de l'État. M. Lisée estime que cette solution fait consensus au Québec. « On sent qu'une grande majorité des Québécois veulent ça, c'est l'offre que nous faisons, a-t-il dit. La CAQ, par exemple, n'a pas le courage d'aller sur les garderies. »

Garderies

S'il est élu, le PQ fera table rase de la réforme libérale de la tarification des services de garde. En début de mandat, le gouvernement Couillard a mis fin au tarif unique de 7,30 $ par jour pour le remplacer par un tarif modulé en fonction du revenu des parents. Un gouvernement péquiste restaurerait un tarif unique de 8,05 $ par jour dans les centres de la petite enfance (CPE) et les garderies subventionnées. La mesure vise à rendre les services à la petite enfance « universels », a expliqué la vice-cheffe Véronique Hivon. « Est-ce que quelqu'un imaginerait ça, en matière d'éducation, de moduler selon le salaire des parents ? Les gens qui font plus d'argent paient déjà plus, à travers leurs impôts, que les gens qui font moins d'argent. »

Briseurs de grève

Un gouvernement péquiste moderniserait le Code du travail en matière de grève de manière à empêcher une réédition des lock-out au Journal de Montréal et au Journal de Québec. Le militant Marc Laviolette a convaincu les délégués d'inscrire cette proposition à la plateforme électorale, dimanche. Le Code du travail stipule qu'en cas de grève ou de lock-out, les travailleurs de remplacement sont interdits « dans l'établissement ». Or, pendant les conflits de travail à Québecor, des travailleurs ont continué de produire les quotidiens en toute légalité parce qu'ils ne se trouvaient pas physiquement sur place. « Ça nous a permis de voir qu'il y avait un trou dans la notion d'établissement », a résumé M. Laviolette. Québecor est la propriété de Pierre Karl Péladeau, ancien chef du Parti québécois.

Écoles privées

Le PQ propose aussi de réviser le financement des écoles privées. La stratégie vise à accorder plus de ressources aux écoles publiques et à bonifier le soutien aux élèves à besoins particuliers. Le PQ proposerait d'ailleurs un projet de loi pour créer un « bouclier de protection » qui empêcherait un gouvernement de réduire le budget des services d'éducation, d'enfance ou de protection de la jeunesse.

Économie

Pour stimuler un « nationalisme économique robuste », le PQ propose de réviser le mandat de la Caisse de dépôt et placement afin qu'elle ait pour mission de protéger les sièges sociaux québécois. On propose aussi de créer un « Fonds des Québécois » dans lequel les petits épargnants pourraient investir pour profiter de l'expertise de la société d'État. Le salaire minimum serait haussé à 15 $ l'heure d'ici à 2022.

Environnement

Un gouvernement péquiste tournerait le dos à l'industrie pétrolière et gazière. La plateforme prévoit l'abrogation de la Loi sur les hydrocarbures adoptée par le gouvernement Couillard et l'interdiction de tout nouveau projet pétrolier ou gazier au Québec. Elle promet aussi une loi pour affirmer la « primauté de la compétence du Québec en matière d'environnement ». Une telle mesure viserait à éviter un bras de fer comme celui qui oppose le gouvernement fédéral à la Colombie-Britannique autour de l'oléoduc Kinder Morgan.

dimanche



La plateforme électorale se veut « sincère et crédible », a affirmé M. Lisée dans un discours pour clore le conseil national. Il souhaite ainsi renvoyer dos à dos le Parti libéral et la Coalition avenir Québec. Le chef compte sur Mme Hivon pour la faire connaître à l'électorat. Tout au long de l'été, elle sillonnera le Québec à bord d'une fourgonnette pour mener une précampagne avec différents candidats. Le véhicule, que M. Lisée a surnommé « Véronique Mobile », a été présenté aux militants dimanche, 24 heures après que François Legault eut montré son autocar de campagne dans son congrès à Lévis.