Philippe Couillard et François Legault visent tous les deux à présenter au moins 40% de candidates aux élections de 2018, mais ils prennent du même souffle leurs distances face à la suggestion faite par le Groupe femmes politique et démocratie (GFPD), qui souhaite que cette base soit inscrite comme un seuil minimal dès l'élection de 2022 au coeur d'une réforme de la loi électorale.

Les chefs des principaux partis étaient rassemblés mardi midi à la bibliothèque de l'Assemblée nationale pour recevoir des mains de Micheline Paradis, présidente du conseil d'administration du GFPD, un projet de loi amendant la Loi électorale pour obliger les formations politiques à présenter «une liste de candidatures dans une zone de parité d'au moins 40% de femmes et d'hommes et d'au plus 60% de femmes et d'hommes» dès l'élection de 2022. Cet objectif serait ensuite haussé à la hauteur de 45-55% dès le scrutin suivant. 

«La parité ne sera jamais acquise tant qu'une loi ne viendra pas en définir les termes d'application d'une façon durable et permanente», a affirmé Mme Paradis devant une foule réunissant des membres du GFPD et d'anciens parlementaires. 

«Avec seulement 29% de femmes élues à l'Assemblée nationale [lors de la dernière élection], nous devons rattraper le retard que le Québec accuse. Nous avons glissé depuis 2012 du 22e rang mondial concernant la proportion de femmes députées au 49e rang. C'est la preuve que le temps n'arrange pas les choses», a-t-elle souligné.

Des chefs de parti présents, Jean-François Lisée (Parti québécois) est le seul qui s'est engagé à adopter une loi sur la parité, sans toutefois définir si elle serait contraignante ou punitive pour les formations politiques qui n'atteindraient pas ces cibles. Du côté de Québec solidaire, même si les positions du parti sont plus contraignantes que celles défendues par le GFPD, on affirme appuyer leur projet de loi par souci d'en arriver à un compromis pour faire avancer le dossier.  

«Doit-il y avoir des sanctions, doit-il y avoir un objectif, des incitations pour les partis [afin qu'ils les atteignent]: l'ensemble de ces éléments fait parti du débat public», a affirmé M. Lisée lors d'une mêlée de presse. 

Le premier ministre Philippe Couillard a pour sa part exprimé ses réserves, affirmant que de nombreuses autres questions (comme la représentation à l'Assemblée nationale des minorités visibles, des minorités sexuelles, des personnes vivant avec un handicap et d'autres groupes de la population) devaient être abordées dès l'instant où une loi prévoit des quotas. 

«Plus on légifère, plus on risque de faire des erreurs. Alors on sera prudent», a dit M. Couillard, assurant que le projet de loi déposé par le GFPD serait étudié par son caucus. 

Le chef de la Coalition avenir Québec (CAQ), François Legault, a pour sa part insisté pour dire qu'il avait donné pour mandat à la directrice générale du parti de recruter le plus grand nombre de candidates possibles, visant la zone de parité. Il s'est toutefois montré prudent concernant la suggestion du GFPD, affirmant que «je ne veux pas m'avancer sur un projet de loi que je ne serais pas capable de respecter.» 

«L'une des plus importantes lois à mon avis pour en arriver à la parité, c'est la réforme du mode de scrutin», a-t-il poursuivi, soulignant que son parti souhaite déposer dès une première année de mandat une réforme pour instaurer un mode de scrutin proportionnel mixte. 

«Avec une proportionnelle, on est obligé de s'entendre avec d'autres partis, chercher ce qu'on a en commun et pas juste ce qui nous différencie. Je pense que ça rejoint beaucoup plus l'approche des femmes», a dit M. Legault. 

La représentation des femmes à l'Assemblée nationale est un enjeu qui revient fréquemment à l'ordre du jour. En décembre dernier, d'anciennes parlementaires avaient réclamé en commission parlementaire une loi sur la parité. En entrevue au Devoir, l'ancienne première ministre Pauline Marois a pour sa part affirmé que c'est plutôt la pression populaire et la volonté politique qui permettrait de voir plus de femmes se présenter en politique.

Photo Jacques Boissinot, La Presse canadienne

François Legault