Le ministre François Blais écorche son comité d'experts sur le revenu minimum garanti, lui reprochant d'avoir produit un rapport «assez confus», «difficile à suivre» et truffé de «contradictions». C'est plutôt rare que le gouvernement accueille ainsi un rapport qu'il a commandé.

Dans son rapport final présenté lundi, le comité propose d'«améliorer» le filet social actuel plutôt que d'instaurer un revenu minimum garanti par l'entremise d'une allocation universelle, une mesure qui causerait des «problèmes d'équité, d'incitation au travail et d'acceptabilité sociale». C'est un constat embarrassant pour François Blais, qui militait pour l'instauration d'un tel revenu minimum garanti avant de faire le saut en politique, à l'époque où il était professeur de philosophie politique à l'Université Laval. Cette mesure est une «utopie», mais le Québec peut y trouver une «inspiration», résume le comité en guise de titre de son rapport.

Certes, le document contient «des choses très intéressantes», à savoir «des mises à jour et des informations techniques qui sont très utiles». Mais «ma déception vient du fait que le rapport est assez confus sur la trame de fond qu'est le revenu minimum garanti», a réagi François Blais, à son arrivée à une réunion du caucus libéral mardi.

Le ministre de l'Emploi et de la Solidarité sociale a mis en relief ce qu'il considère comme des «contradictions». «On dit que c'est une utopie inspirante, et ensuite on dit qu'on en a déjà un au Québec. La définition est assez originale. Finalement, si on suit la définition, il y en a un partout au Canada, même dans tous les pays de l'OCDE. On dit que ça coûte trop cher. On fait une proposition d'amélioration importante de la prime au travail (évaluée à un milliard de dollars, ndlr) qui fait qu'on se rapprocherait d'un impôt négatif», a-t-il affirmé.

Le comité d'experts a conclu que le gouvernement devrait augmenter l'aide aux personnes seules et aux couples sans enfants, négligés au cours des dernières années. Sur ce point, le ministre est d'accord. «Pour les personnes seules, on a encore un peu de travail à faire», a-t-il dit. Son nouveau plan de lutte contre la pauvreté, attendu cet automne, leur viendra en aide.

À l'aide sociale, le comité d'experts recommande que le revenu d'une personne corresponde à 55% de la Mesure du panier de consommation (MPC). Il se situe à l'heure actuelle à 52% pour une personne seule (9192 $) et à 54% (13 355 $) pour un couple sans enfant aptes au travail. Sa recommandation revient à augmenter l'aide sociale de 472 $ par an pour une personne seule et de 311 $ pour un couple sans enfants. La mesure coûterait 86,4 millions de dollars.

Le ministre Blais n'a pas montré beaucoup d'intérêt à l'égard de cette recommandation. Une autre proposition, celle d'augmenter la Prime au travail destinée aux bas salariés, semble davantage lui plaire. Augmenter de façon importante l'aide sociale n'inciterait pas à intégrer le marché du travail, car le revenu s'approcherait du salaire minimum, a-t-il expliqué. «Si vous augmentez la Prime au travail, vous n'augmentez pas l'aide sociale, mais vous augmentez le revenu disponible des personnes pauvres au travail.»