Quelque 260 000 entreprises québécoises seront tenues de se doter d'une politique pour contrer le harcèlement sexuel au travail. Les employés qui sont victimes d'inconduites sexuelles à leur emploi auront sous la main une définition de ce qui constitue une inconduite et une procédure claire décrivant explicitement le cheminement pour porter plainte.

Ces dispositions feront partie de la réforme de la Loi sur les normes du travail qui sera déposée avant les Fêtes par la ministre du Travail, Dominique Vien. Selon les sources de La Presse, la mesure veut répondre à une revendication de longue date des groupes féministes, qui voulaient que le harcèlement sexuel soit traité de façon distincte du harcèlement psychologique, déjà inscrit dans la loi depuis 15 ans.

Actuellement, la loi ne mentionne pas de façon explicite le harcèlement sexuel. Celui-ci est « inclus dans la définition législative du harcèlement psychologique ».

Les employeurs seront tenus de se doter d'une politique d'action en cas de harcèlement sexuel et d'en informer les employés. Comme bien des petites entreprises n'ont pas les moyens de payer des spécialistes ou des avocats pour accoucher d'une politique, on espère, au gouvernement, qu'ils adopteront un plan de match uniformisé qui sera diffusé par la Commission des normes.

À Québec, on insiste : ces modifications étaient prévues avant la cascade de dénonciations des dernières semaines, qui ont incité cette semaine le gouvernement Trudeau à poser un geste et à regrouper une série de mesures jusqu'alors éparpillées dans le Code canadien du travail. Le projet de loi d'Ottawa s'appliquera à l'ensemble de l'administration fédérale, de même qu'aux secteurs de compétence fédérale, comme les banques et les télécommunications.

À Québec, les modifications toucheront avant tout les entreprises non syndiquées. Pour celles qui ont une convention collective, on prévoit des réponses à ces cas de harcèlement, les plaintes sont accueillies par le syndicat.

Avec les nouvelles règles du jeu, un employé pourra porter plainte sans mettre son emploi en danger.

La Commission des normes, de l'équité, de la santé et de la sécurité du travail recevra les doléances des salariés. Un mécanisme sera même disponible pour vérifier s'il s'agit bien d'un cas de harcèlement sexuel - beaucoup de plaintes de harcèlement psychologique débouchent sur un non-lieu.

Si la plainte est accueillie, l'entreprise se verra signifier par la Commission qu'elle doit prendre des mesures pour normaliser la situation. L'employé ne sera pas identifié, indique-t-on, convenant que la situation pourrait être plus délicate dans les entreprises où le nombre d'employés est très petit. On croit que ces mesures sont de nature à augmenter le nombre de plaintes. Jusqu'ici, le harcèlement sexuel était amalgamé au harcèlement psychologique, mais la Commission des normes avait tenté de l'illustrer par une série de constats.

Font partie de l'inconduite constituant du harcèlement sexuel « la sollicitation de faveurs sexuelles non désirées, des commentaires inappropriés d'ordre sexuel, des remarques sur le corps de la victime. Des questions intimes, des regards concupiscents, dirigés vers les parties sexuelles de la victime. Des sifflements, de l'affichage de photos pornographiques et des contacts physiques non désirés, des attouchements, pincements et frôlements ».

Agences de placement

Le projet de loi qui fera l'objet de consultations au début de 2018 - on espère qu'il sera adopté à la session du printemps à l'Assemblée - entend aussi mettre de l'ordre dans la jungle des agences de placement, entreprises qui font fi de bien des dispositions du Code du travail dans le sort qu'elles réservent à leurs employés de courte durée.

Au Sommet sur l'emploi, le premier ministre Couillard s'était aussi engagé à discipliner la jungle des agences de placement.

Ces firmes qui trouvent des employés temporaires pour des travaux limités dans le temps ne sont encadrées par aucune loi. Ces entreprises disparaissent parfois du jour au lendemain pour réapparaître sous un autre nom. Le Québec est la seule province canadienne à tolérer cette situation.

On voudra aussi répondre à une résolution des militants libéraux, mandat dont avait été chargé le député André Fortin, devenu ministre des Transports depuis. On s'assurera que les nouveaux employés aient le même régime de retraite et les mêmes régimes d'assurance collective que ceux qui sont entrés plus tôt à l'emploi.

On le sait depuis le printemps dernier, avec les indications de Philippe Couillard, la refonte de la loi sur les normes minimales de travail prévoira davantage de semaines de vacances et de jours de congé rétribués pour les salariés non syndiqués.

Il y aura aussi plus de souplesse pour les aidants naturels. M. Couillard avait opté pour cette orientation au moment où il mettait de côté le scénario d'une augmentation du salaire minimum à 15 $, mesure adoptée par l'Ontario au printemps dernier.