D'anciens collègues du ministre libéral Jérôme Choquette, mort vendredi, se souviennent d'un juriste «compétent», «intègre» et extrêmement «ferme» avec la loi qu'il devait appliquer à la lettre en tant que procureur général.

L'ex-ministre du Travail, Jean Cournoyer, a appris à ses dépens la grande fermeté de M. Choquette lorsqu'il a vu que son collègue avait jeté en prison les trois chefs des centrales syndicales qui avaient défié la loi spéciale du gouvernement à l'époque.

«Le gouvernement était pogné avec ça, les trois chefs syndicaux en prison! La réputation du Québec était en danger à travers le monde, on avait l'air d'un pays du tiers-monde, en ce qui me concerne», a-t-il déclaré en entrevue téléphonique.

«Sauf que lui, il n'avait pas mis des chefs syndicaux en prison, il a mis des gens qui ont été coupables de mépris de cour. Le titre qu'ils possédaient, ça n'avait pas d'importance pour lui.»

Le juriste en chef de l'État québécois répétait à l'époque qu'ils «avaient juste à aller en appel».

«Son leitmotiv sur l'emprisonnement des chefs syndicaux, c'était de dire: »ce n'est pas moi qui les ai envoyés en prison, ce sont eux qui ont voulu aller en prison«», a ajouté M. Cournoyer.

M. Choquette prenait très au sérieux son rôle de ministre de la Justice, selon Jean Cournoyer, et il avait prévenu le conseil des ministres qu'il «ne répondait pas au gouvernement».

«Il n'était pas question qu'on se mêle de la justice.»

L'ancien premier ministre péquiste Bernard Landry se souvient d'un «bon serviteur de l'État» avec qui il a toujours eu de bonnes relations.

«On avait des différences politiques évidemment considérables, mais ça ne m'a pas empêché d'apprécier ce qu'il a fait pour notre État national», a-t-il confié en entrevue.

Plusieurs se souviennent de Jérôme Choquette pour son rôle dans la crise d'octobre, qui a été marquée par l'imposition de la Loi sur les mesures de guerre. Ce fut un épisode «douloureux» pour lui, a témoigné le député Jean-Claude Gobé, son ami de longue date.

«Il croyait beaucoup à la liberté, il a fait la Charte des droits et libertés, ce n'est pas pour rien. Et lui, le fait de suspendre les libertés avec la Loi sur les mesures de guerre...il n'était pas content», a-t-il témoigné.

«Il vivait ça douloureusement.»

Riche héritage

Malgré ces controverses, Jean Cournoyer a tenu à rappeler l'héritage «social» de Jérôme Choquette.

«La Loi des petites créances, ça a donné accès à la justice à bien du monde qui n'y avait pas accès avant parce que ça coûtait trop cher. La Loi sur l'indemnisation des victimes d'actes criminels... Ce sont des choses qui n'existaient pas avant lui», a soutenu l'ancien ministre.

Le bâtonnier du Québec a par ailleurs salué «le père de l'aide juridique».

«Ce n'est certainement pas un hommage général sur l'homme ou sur son héritage politique complet, mais il faut mentionner qu'il est le père de l'aide juridique, une innovation importante du système de justice qui est plus que jamais d'actualité», a déclaré Paul-Matthieu Grondin, dans une déclaration transmise à La Presse canadienne.