Le gouvernement Couillard n'appuiera pas un projet de loi qui forcerait les partis politiques à présenter autant de femmes que d'hommes aux élections, a affirmé hier la ministre responsable de la Condition féminine, Lise Thériault.

En entrevue avec La Presse depuis le Japon, où elle pilote une mission, Mme Thériault a salué la récente sortie d'un groupe d'anciennes parlementaires de différents horizons politiques, qui ont réclamé une loi pour imposer la parité dans les candidatures.

Bien qu'elle partage leur objectif d'attirer davantage de femmes en politique, la ministre estime que Québec ferait fausse route en l'imposant par la voie législative.

« Oui, ça prend plus de femmes en politique, oui aux mesures incitatives, non aux quotas », a résumé Mme Thériault.

À ses yeux, les partis politiques devraient présenter des candidates parce qu'elles sont compétentes, et pas seulement pour respecter un seuil minimal. Un tel scénario aurait pour effet de dévaloriser le rôle des femmes en politique.

LA LIBERTÉ D'INVESTITURE

« Les femmes ne veulent pas se faire dire qu'elles occupent un poste ou qu'elles sont à un endroit parce qu'il y a un quota, a dit Mme Thériault. Moi-même, quelqu'un m'a déjà dit lors d'une entrevue que j'étais ministre parce qu'il y avait des quotas, que ça prenait des femmes, donc que j'étais ministre. Je trouve ça franchement insultant. »

Les partis tiennent généralement des assemblées d'investiture au cours desquelles les membres sélectionnent les candidatures. Une loi qui imposerait la parité aurait pour effet de brimer le droit de leurs membres de choisir leurs représentants, fait valoir Lise Thériault.

Elle estime que c'est aux leaders politiques d'accentuer leurs efforts pour attirer des candidates. Elle cite en exemple le Parti libéral, qui a présenté 8 candidates lors des 13 élections partielles qui se sont déroulées depuis les dernières élections générales.

« Ce sont les chefs des partis politiques qui doivent d'abord et avant tout donner l'exemple. C'est évident que si tu ne présentes pas de femmes, tu ne peux pas faire élire de femmes. Et si tu présentes des femmes dans des circonscriptions qui sont perdues d'avance parce qu'il y a des majorités insurmontables, tu ne fais pas avancer la cause des femmes. » - Lise Thériault

Le Secrétariat à la condition féminine que dirige Mme Thériault planche sur une stratégie de promotion de l'égalité entre les hommes et les femmes. Le projet sera présenté au printemps, et un volet sera consacré au monde politique.

La ministre se dit favorable à des mesures incitatives pour encourager le recrutement de candidates. Car elle reconnaît que les partis peinent à convaincre des femmes à faire le saut en politique partisane.

« On a des femmes de qualité en quantité au Québec, a-t-elle dit. Il faut les intéresser à venir faire de la politique. Mais parfois, quand on regarde de quelle manière les gens font de la politique, ce n'est pas toujours encourageant de se lancer dans cette arène-là. »

Le groupe d'ex-parlementaires dont l'ex-ministre Marie Malavoy s'est faite la porte-parole propose à Québec de légiférer pour forcer les partis à présenter un minimum de 40 % de candidates aux élections générales. Lors de sa réaction initiale, lundi, Mme Thériault n'avait pas exclu d'appuyer une telle initiative.

La proposition a reçu un accueil mitigé à l'Assemblée nationale. Le Parti québécois souhaite « étudier sérieusement » la proposition, mais ne l'appuie pas formellement. La Coalition avenir Québec est d'accord avec la mesure, à condition qu'elle soit accompagnée de l'introduction du mode de scrutin proportionnel, ce qui permettrait de dresser des listes de candidatures paritaires. Québec solidaire est le seul parti qui appuie entièrement l'idée.

La présidente du Cercle des femmes de l'Assemblée nationale, la députée libérale Maryse Gaudreault, a elle aussi pris position contre l'adoption d'une loi sur la parité.