Québec solidaire (QS) a mis les bouchées doubles, mardi, en optant à la fois pour le dépôt d'un projet de loi et d'une poursuite judiciaire afin d'empêcher la disparition de la circonscription montréalaise de la députée Manon Massé.

Mme Massé a commencé sa journée en allant porter au Directeur général des élections (DGE), Pierre Reid, une pétition signée par 14 000 personnes qui réclament de nouvelles consultations publiques.

Après sa rencontre avec M. Reid, la députée de Sainte-Marie-Saint-Jacques s'est montrée encouragée par son ouverture.

«Il nous dit que la loi l'oblige à faire des choses, mais que si la loi change, il va s'adapter», a-t-elle indiqué dans un bref point de presse dans les bureaux du DGE.

Quelques instants plus tôt, M. Reid avait accueilli la pétition en affirmant qu'il était lié par les délais prévus dans la Loi électorale, qui ne permettent pas de nouvelles consultations.

«Au regard des auditions que vous réclamez, moi je suis ouvert, mais il faut modifier la loi pour le faire», a-t-il dit à la députée, devant les journalistes.

M. Reid a provoqué la surprise de QS, la semaine dernière, en annonçant dans son rapport final la disparition de Sainte-Marie-Saint-Jacques, un scénario qui n'apparaissait pas dans sa proposition préliminaire, qui a été suivie de consultations publiques.

Inscrit au feuilleton de l'Assemblée nationale en prévision de son dépôt, le projet de loi de QS, dont le contenu est inconnu, s'intitule «Loi concernant la suspension du processus de délimitation des circonscriptions électorales».

Avec ce texte, qui pour être adopté devra recevoir l'appui d'une majorité de parlementaires, les deux députés de QS souhaitent freiner le processus qui doit consacrer dans dix jours la disparition de Sainte-Marie-Saint-Jacques et de Westmount-Saint-Louis, qui doit donner naissance à un nouveau comté, Ville-Marie, à Montréal.

QS souhaite ensuite écrire un autre projet de loi, en collaboration avec les autres partis, qui préciserait de nouvelles modalités pour l'adoption d'une carte électorale.

La ministre responsable de la Réforme des institutions démocratiques, Rita De Santis, a exprimé des réserves, mardi, sur la suspension de la carte électorale.

Selon Mme De Santis, une telle décision sans balises ouvrirait la porte à des contestations sans fin d'une éventuelle troisième proposition du DGE.

«Dans un troisième rapport, au lieu de décider que c'est Sainte-Marie-Saint-Jacques et Westmount-Saint-Louis qui ne seront plus là, ça se peut qu'on regarde l'est de l'île de Montréal, et c'est Pointe-aux-Trembles et les comtés avoisinants qui vont être affectés, a-t-elle dit. Alors, on va toujours arriver à un point où cette possibilité de quelque chose qui est aussi important que ce qui nous est présenté aujourd'hui va arriver. À un moment donné, il faut dire: »C'est un processus, on le respecte, et c'est fini«.»

Le chef péquiste Jean-François Lisée a répété son ouverture à de nouvelles consultations ainsi qu'à la fusion des circonscriptions de Mont-Royal et d'Outremont, évoquées dans la proposition préliminaire comme scénario pour soustraire un comté à Montréal, en raison d'une baisse de la population.

«On va attendre de voir le libellé pour la suite des choses, a-t-il dit. Mais, certainement, je ne veux pas qu'aujourd'hui sonne le glas d'une circonscription de l'île de Montréal dont le caractère représentatif me semble satisfaisant et qui serait une réelle perte.»

Le chef caquiste François Legault a lui aussi insisté à nouveau sur la nécessité de nouvelles consultations.

«Qu'on prenne quelques semaines pour entendre tous ceux qui ne sont pas contents, entre autres, dans Sainte-Marie-Saint-Jacques, ça, c'est correct, a-t-il dit. Mais il ne faut pas faire déraper le processus. Il faut une nouvelle carte électorale pour la prochaine campagne électorale.»

Par ailleurs, Mme Massé a donné son appui à deux militants de QS qui souhaitent s'adresser aux tribunaux pour bloquer le processus entamé par le DGE au sein de la Commission de la représentation électorale et obtenir une ordonnance qui forcerait de nouvelles consultations.

Selon la députée, QS souhaite ainsi utiliser tous les recours à sa disposition pour avoir gain de cause.

«On va pédaler puis on va essayer de mettre les bretelles, la ceinture, on va faire tout ce qu'on peut, parce qu'on ne sait pas ce qui va marcher», a-t-elle dit.

La requête doit être entendue vendredi à Québec.