Le chef péquiste Jean-François Lisée se dit à l'aise avec la perspective de diriger une province, car une province comme le Québec possède déjà beaucoup de pouvoirs d'intervention, selon lui.

Son objectif demeure de faire l'indépendance du Québec, mais dans l'intervalle, il convient que dans le cadre constitutionnel actuel, un éventuel gouvernement péquiste pourrait agir, ayant à sa disposition de nombreux leviers.

C'est ce qu'a fait valoir le nouveau chef péquiste, jeudi soir, lors d'une brève mêlée de presse, en marge d'une conférence prononcée par l'ex-premier ministre Lucien Bouchard, invité dans le cadre d'un colloque tenu à la mémoire de l'ex-premier ministre et fondateur du Parti québécois, René Lévesque.

Les propos de M. Lisée allaient dans le même sens que ceux tenus quelques minutes plus tôt par Lucien Bouchard, qui venait de fustiger les souverainistes qui n'oseraient pas s'abaisser à diriger le Québec en tant que province.

C'était là musique aux oreilles du nouveau chef péquiste, qui s'est engagé à ne pas tenir de référendum dans un premier mandat, s'il est porté au pouvoir en 2018.

«On peut faire des choses énormes comme province du Québec», a reconnu M. Lisée, ajoutant qu'il avait l'intention de dire à la population qu'un gouvernement péquiste «ferait encore mieux» si le Québec votait pour sa souveraineté.

Réalisations des gouvernements péquistes

Dans sa conférence, Lucien Bouchard avait dressé une longue liste de réalisations des gouvernements des dernières décennies, qu'il s'agisse des lois linguistiques ou de l'assainissement des moeurs électorales, en passant par l'assurance automobile, le zonage agricole et la création de leviers économiques, cherchant à faire la démonstration que le Québec pouvait très bien s'épanouir, même sans acquérir son indépendance.

Sans nommer personne, M. Bouchard a dit ne pas comprendre «la répugnance exprimée par certains à gouverner une province».

Il a reproché à ces souverainistes pressés et intransigeants de «minimiser le rôle crucial» du gouvernement du Québec, avec son statut actuel, «dans la survie et le développement de notre peuple».

«C'était un de mes bouts préférés» de son discours, a dit par la suite M. Lisée.

Sur la question identitaire et l'immigration, M. Bouchard réservait quelques flèches aux candidats à la succession de Pierre Karl Péladeau, prenant ses distances des débats ayant eu cours durant la récente course au leadership au PQ, et laissant entendre que René Lévesque aurait été mal à l'aise lui aussi d'entendre certaines propositions faites par les candidats.

«À l'affût de tout dérapage»

René Lévesque n'aurait pas apprécié le discours cherchant à limiter l'immigration ou à imposer des normes particulières aux immigrants, selon M. Bouchard.

M. Lévesque était «à l'affut de tout dérapage» de son parti sur ces questions, selon l'ancien premier ministre.

Dans le même esprit, «il aurait pris ses distances avec la malencontreuse charte des valeurs» de l'ex-gouvernement Marois, a-t-il estimé.

Le fondateur du PQ, qui avait un «attachement indéfectible à la démocratie» et à la protection des droits des minorités, «s'inquiéterait de tout dévoiement identitaire, craignant l'effet d'exclusion qu'en subiraient les nouveaux arrivants et les minorités issues de l'immigration», a commenté M. Bouchard.

M. Lisée prône une réduction des seuils d'immigration.

Après son discours, livré au pavillon Lassonde du Musée national des beaux-arts du Québec, M. Bouchard a refusé de préciser sa pensée devant les journalistes. «Vous me permettrez de m'en tenir à mon texte», a-t-il dit.