Le front commun du taxi a perdu une première manche, mardi, la Cour supérieure ayant refusé de lui accorder l'injonction interlocutoire urgente qu'il demandait contre Uber et son projet pilote.

Après trois jours de délibérations, le juge Michel Déziel a tranché : la requête du Front commun des taxis est «prématurée», puisqu'a ce stade, le projet pilote annoncé par le gouvernement n'est toujours pas en vigueur. «Les injonctions provisoires (comme celle que réclament les représentants des taxis) doivent être prononcées dans des cas urgents où même le délai pour obtenir une audience devant le tribunal met à risque le demandeur de subir des dommages irréparables», a souligné le magistrat.

Ce projet pilote doit permettre au transporteur Uber de continuer à fonctionner dans un certain cadre réglementaire, mais différent de celui auquel l'industrie du taxi est soumise.

L'avocat des taxis, Marc-Antoine Cloutier, avait soutenu dans sa plaidoirie que le ministre des Transports, Laurent Lessard, a outrepassé ses pouvoirs en négociant une entente sans qu'Uber ne possède de permis d'intermédiaire de taxi. Le juge Déziel rejette cette interprétation: «Les tribunaux ne peuvent intervenir dans le processus législatif», a-t-il justifié. La nouvelle loi sur le transport par taxi «attribue au ministre une grande discrétion» quant aux modalités d'application des projets pilotes. «Le tribunal n'a pas à s'immiscer dans le débat à ce stade», estime le juge.

La cour estime néanmoins que l'arrivée d'Uber suscite un débat suffisamment important pour prononcer une «ordonnance de gestion» accélérant considérablement l'étude des arguments de fond avancés par le front commun des taxis dans sa requête d'injonction permanente déposée la semaine dernière. Les partis seront entendus sur le fond par la cour en janvier.

«C'est la première fois de ma vie que j'entends un jugement qui ne reconnaît pas l'urgence, mais qui reconnaît l'urgence du bien-fondé du dossier. Ça fait un peu drôle, mais c'est ainsi», a déclaré le porte-parole du front des taxis Guy Chevrette, à sa sortie de la salle d'audience.

L'avocat du front commun des taxis, Marc-Antoine Cloutier, doit défendre une autre demande d'injonction contre Uber ce jeudi. Il s'agit d'une requête qui avait été déposée au printemps dernier et dont certains détails seront modifiés pour tenir compte de la décision du juge Déziel.

«Le jugement d'aujourd'hui confirme que nous pouvons continuer de servir les Québécois sous l'entente avec le gouvernement», a déclaré Jean-Nicolas Guillemette, directeur général de Uber Québec. «Notre priorité demeure d'offrir une alternative de transport de qualité, sous les conditions définies par le projet pilote et imposées par le gouvernement», a-t-il affirmé par la suite. 

Au palais de justice, les avocats d'Uber n'ont pas voulu commenter l'affaire devant les médias.

- Avec La Presse canadienne