En plus de contester la prédominance de l'ancienneté et l'essor de « clauses orphelin » dans le monde du travail, les jeunes libéraux demandent au gouvernement Couillard de lancer une commission d'enquête publique sur « le racisme et la discrimination systémiques qui sévissent au Québec ». Elle doit avoir des pouvoirs semblables à ceux de la Commission Charbonneau, réclament-ils.

La commission jeunesse du Parti libéral du Québec a dévoilé mercredi son cahier de propositions en vue de son congrès annuel qui aura lieu ce weekend à Saint-Augustin-de-Desmaures, en banlieue de Québec. Ce rendez-vous a pour thème l'innovation et les propositions ratissent large.

Ainsi, l'aile jeunesse propose que « le gouvernement du Québec ordonne dans les plus brefs délais la mise en place d'une commission d'enquête publique afin de faire la lumière sur le racisme et la discrimination systémiques qui sévissent au Québec ». Ce phénomène constitue un « frein à l'intégration ». « Il existe au Québec des situations de disparités vis-à-vis les Québécois issus de la diversité qui ne peuvent plus durer », peut-on lire dans le cahier de propositions.

« Je ne dirais pas que le Québec est plus raciste qu'ailleurs, a affirmé son président Jonathan Marleau en entrevue à La Presse. Ce qu'il faut comprendre, c'est que le Québécois moyen n'est pas raciste, mais peut avoir des comportements qui eux le sont. C'est un peu comme dire : "moi je ne suis pas raciste, mais je préfère qu'ils soient dans leurs pays". Vous voyez un peu le truc ? On ne veut pas savoir si des gens dans la rue sont plus racistes que d'autres. On veut savoir ce qui, dans le système, permet qu'une personne ne se considère pas raciste tout en ayant des comportements racistes parfois. »

Il a donné son expérience personnelle à titre d'exemple. « En tant que personne noire, oui je suis d'origine haïtienne, mais je me considère aussi comme un Québécois, mais encore aujourd'hui en 2016, quand je vais me louer un appartement, je le fais avec un ami blanc parce que c'est toujours plus simple. C'est le genre de problématiques qu'on n'a pas nécessairement conscience quand on n'est pas victime de ces choses-là, mais qui, au quotidien, finissent par nous affecter. Avoir une commission va amener les gens à avoir conscience que ce phénomène-là existe au Québec. »

Il a également fait valoir que « si on s'appelle Bilodeau ou Tremblay au Québec, on a 60 % plus de chances de se faire appeler pour une entrevue d'embauche que si on appelle El Sahid ».

L'aile jeunesse privilégie une enquête publique, plutôt qu'une commission parlementaire par exemple, afin d'éviter que le débat tourne au « show de cirque », où « tout un chacun se présente et dit n'importe quoi ». « On ne veut pas créer un nouveau débat public ou monsieur madame Tout-le-monde va pouvoir exprimer le fait qu'il y a ou pas du racisme au Québec. Ce qu'on dit, ce qu'on remarque, c'est qu'il y a du racisme au Québec, du racisme qui peut être une discrimination à l'embauche par exemple. On veut aller chercher les causes dans le système qui font en sorte que ça arrive pour qu'on aille chercher des solutions. »

Les commissaires devraient avoir le pouvoir de convoquer des témoins comme la Commission Charbonneau, un élément essentiel qui milite pour le choix d'une enquête publique selon Jonathan Marleau. L'objectif n'est pas de « chercher des coupables », mais plutôt de briser « un système qui s'opère en ce moment de manière généralisée ou non, la commission pourra le dire ».

Par exemple, les dirigeants des ordres professionnels devraient témoigner pour expliquer « pourquoi il n'y a pas plus de personnes issues de la diversité » dans leurs rangs. Autre question que les commissaires devraient se poser : « Pourquoi il n'y a pas plus de personnes issues de la diversité comme fonctionnaire dans la fonction publique ? » s'est demandé M. Marleau. La commission jeunesse demande d'ailleurs que le gouvernement « mette un terme à toute forme de dérogation lui permettant de se soustraire à l'application de la Loi sur l'accès à l'égalité en emploi au sein des organismes publics ». Elle veut également qu'il « finance adéquatement la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse afin de lui permettre de remplir son mandat légal ».

Par ailleurs, la commission veut combattre la prédominance de l'ancienneté et la prolifération de clauses de disparité de traitement - mieux connues sous le nom de « clauses orphelins ». Elle demande que « le gouvernement du Québec encadre, par une loi, toute prime à l'ancienneté dans l'attribution des privilèges accordés aux employés de la fonction publique et des organismes publics ». Il doit également « clarifier la Loi sur les normes du travail afin de clairement interdire, dans les régimes de retraite complémentaires, les régimes d'assurance collective et toute autre forme de rémunération ou d'avantage ayant une valeur pécuniaire, qui sont liés au travail ou aux services d'un salarié, des clauses de disparité des traitements en fonction de la date d'embauche ».