Le gouvernement Couillard déclare la guerre à Greenpeace, qu'il accuse de «désinformation» en faveur des concurrents du Québec.

L'organisme écologiste dénonce l'exploitation de la forêt des montagnes Blanches, un territoire situé près du lac Mistassini, au nord du Saguenay-Lac-Saint-Jean.

Greenpeace a envoyé un rapport à une centaine de grands acheteurs de bois et de papier issus de la forêt boréale canadienne dans lequel il déplore la disparition d'un million d'hectares de forêt vierge.

Dans un communiqué transmis mercredi, l'organisation estime que près de la moitié des paysages forestiers intacts des montagnes Blanches ont été dégradés par les coupes et les routes forestières. Or, il s'agit d'un des derniers habitats du caribou forestier.

Cette détérioration est en grande partie à l'origine de la perte par la société Produits forestiers Résolu des certificats environnementaux du Forest Stewardship Council (FSC), affirme Greenpeace, qui soutient que le gouvernement semble depuis vouloir accélérer l'exploitation des secteurs vierges dans cette forêt.

Le ministre des Forêts, Laurent Lessard, a fait une sortie virulente mercredi matin contre l'organisation de défense de l'environnement. Il a rappelé qu'il était allé plaider personnellement auprès du FSC en faveur du travail exemplaire de son gouvernement.

«J'étais incapable de trouver dans le monde un autre État qui en avait fait autant que le Québec et à ce jour personne ne me contredit là-dessus», a-t-il dit avant d'entrer à la séance du caucus libéral.

Le gouvernement Couillard soutient qu'il protège déjà 90 pour cent des forêts intactes au Québec: 80% de ces forêts sont situées au nord de la limite nordique et 10 pour cent au sud, dans des zones protégées.

Laurent Lessard a également rappelé qu'une démarche d'intervention sur le caribou forestier était en cours avec le ministère de l'Environnement dans un secteur des montagnes Blanches.

«Je déteste le dénigrement systématique de la forêt québécoise qui est fait (auprès des clients internationaux)», a-t-il déclaré, en soutenant que l'exploitation forestière effectuée dans la région des montagnes Blanches a été autorisée en vertu du «régime forestier le plus sévère au monde».

Le ministre des Forêts a indiqué qu'il existe un plan du gouvernement pour lutter «contre la désinformation» répandue par les groupes environnementalistes, quels qu'ils soient. Il entend leur barrer la route, car il les soupçonne entre autres de travailler ainsi en faveur des rivaux du Québec dans les marchés internationaux.

«Ce matin (mercredi), ils (les gens de Greenpeace) me motivent encore plus, a-t-il lancé. Je vais lutter de toutes mes forces contre la désinformation. Cela ne peut pas nous aider. Quand quelqu'un fait une dénonciation, des reportages truffés d'erreurs, sincèrement il y a quelqu'un qui veut avantager un autre État forestier que le Québec. (...) Mais ils vont me trouver partout où ce genre d'information ne représentera pas la réalité.»

Greenpeace Canada a réagi à la sortie du ministre en fin de journée. L'organisme a tenu à rappeler que ses données s'appuyaient sur des images satellites compilées par l'Université du Maryland.

«Est-ce que M. Lessard laisse sous-entendre que les satellites font de la désinformation?», a demandé le responsable de la campagne Forêts de Greenpeace Canada, le biologiste Nicolas Mainville, en invitant le ministre à consulter ses propres images satellite pour constater le «recul marqué» des forêts intactes au nord du Saguenay-Lac-Saint-Jean.

Greenpeace affirme que ses demandes de rendez-vous avec le ministre sont restées sans réponse depuis plus d'un an, mais dit être toujours ouverte à le rencontrer.

En mai, Québec a mis aux enchères plus de 3000 hectares de forêts dans le secteur des montagnes Blanches, encourageant l'industrie à exploiter ces zones vierges, soutient Greenpeace dans son communiqué. Depuis l'établissement du Bureau de mise en marché des bois en 2013, plus de 16 000 hectares des montagnes Blanches ont été mis en enchères, peut-on lire. Les plus bas soumissionnaires ont été Arbec et Produits forestiers Résolu, qui ont déboursés aussi peu que 0,35 $ par arbre dans certains secteurs, a précisé l'organisme.

PHOTO LE SOLEIL

Laurent Lessard