Le gouvernement Couillard refuse de dire s'il a le pouvoir de bloquer l'oléoduc Énergie Est, lui qui affirmait vendredi que le projet controversé de TransCanada devrait se « soumettre » à la loi québécoise. Un mutisme qui inquiète l'opposition.

Dans un communiqué émis vendredi, le ministre de l'Environnement, David Heurtel, se targuait d'avoir conclu une entente à l'amiable par laquelle Énergie Est serait évalué de manière approfondie par le BAPE. Or, a révélé La Presse, hier, la société albertaine refuse toujours de reconnaître que son projet est soumis à la Loi québécoise sur la qualité de l'environnement (LQE).

Ce désaccord est important parce que la loi donne à Québec le pouvoir d'imposer des modifications substantielles au projet. TransCanada considère depuis toujours que seul le gouvernement fédéral a le pouvoir de statuer sur l'oléoduc après des audiences de l'Office national de l'énergie.

M. Heurtel a été invité à plusieurs reprises à clarifier la position de son gouvernement au cours des derniers jours. Il s'est emmuré dans le silence le plus complet. Il a ignoré toutes les questions des journalistes depuis son retour à l'Assemblée nationale mardi.

Son collègue aux Ressources naturelles, Pierre Arcand, a lui aussi refusé de commenter le dossier au cours des derniers jours en affirmant que le dossier relève de M. Heurtel.

« Mascarade »

Le mutisme du gouvernement inquiète au plus haut point le député du Parti québécois, Mathieu Traversy. Selon lui, le fait que le ministre refuse obstinément de répondre aux questions prouve que l'entente annoncée vendredi est un écran de fumée.

« S'il n'est pas capable d'affirmer clairement que le Québec aura le dernier mot à la fin du processus, ça devient une mascarade politique, c'est un "show de boucane", a-t-il dénoncé. Ce qu'on veut avoir, c'est un ministre qui se tient debout et qui nous affirme que, dans la procédure du BAPE, à la toute fin, il émettra son opinion et que cette opinion sera respectée. »

M. Traversy  accuse le ministre Heurtel d'agir comme un « facilitateur » pour TransCanada.

Mardi, le Parti québécois a déposé une motion qui stipulait explicitement que le gouvernement du Québec est responsable de l'approbation du projet Énergie Est. Le gouvernement Couillard a refusé d'appuyer l'initiative.

L'avocat Jean Baril, du Centre québécois du droit de l'environnement, s'explique mal que Québec refuse d'affirmer clairement son pouvoir de statuer sur Énergie Est.

« Le ministre pourrait, devrait, le dire, le premier ministre aussi, a dit M. Baril. Mais depuis le début de ce feuilleton, on est dans les louvoiements. Ça donne l'impression que les lobbyistes qui sont payés par TransCanada ont plus de pouvoir que la Loi québécoise sur la qualité de l'environnement. »