Le vérificateur André Lebon a fait des « recommandations de grande qualité » pour prévenir les fugues d'adolescentes hébergées dans des centres jeunesse, mais il erre en laissant entendre que les coupes budgétaires ont empiré ce problème, soutient le premier ministre Philippe Couillard.

« Je pense que c'est un peu court de dire que ce sont des circonstances externes d'origine budgétaire qui accompagnent ou causent ces situations-là qui sont dramatiques et particulières », a répondu M. Couillard lorsqu'on l'a questionné sur les constats de M. Lebon mercredi.

Dans un passage de son rapport intitulé À prévenir absolument : la fugue du financement, le vérificateur nommé par Québec met en cause les compressions du gouvernement. « Il est futile de penser réduire les fugues ou mieux accompagner les jeunes filles en cause s'il y a, en même temps, fugue/fuite du financement et des compétences », écrit-il. Il donne l'exemple des coupes faites dans le projet Mobilis à Longueuil, un projet qui vise à lutter contre l'exploitation sexuelle des jeunes filles.

Ce projet « si inspirant et efficace a perdu l'appui des enquêteurs de la police suite à des désengagements financiers des partenaires avec pour conséquence qu'on est passé de 100 % de poursuites en justice réussies en 3 ans (contre des proxénètes) à 0 % depuis le retrait des enquêteurs », affirme M. Lebon. Les centres jeunesse ont également subi des coupes de 20 millions, ce que le vérificateur ne rappelle pas directement.

« Mobilis, c'est malheureusement le plus mauvais exemple à utiliser, parce que les coupes n'ont pas touché ce programme, l'argent n'a pas été retiré, l'argent est encore aujourd'hui dans la municipalité », a affirmé M. Couillard. La mairesse Caroline St-Hilaire a une tout autre façon de voir les choses.

Philippe Couillard croit que des « façons de faire » doivent changer dans les centres jeunesse, comme le montre le vérificateur. La solution ne passe pas nécessairement par des investissements supplémentaires. « Je suis toujours très prudent au sujet de ce lien voulant que si on met plus d'argent, ce sera miraculeusement meilleur. Je pense que les façons de faire aussi sont importantes et comptent beaucoup », a-t-il plaidé.

« Il y a de l'argent dans le système. Nous dépensons, investissons dirait-on aussi, un milliard de dollars dans les centres jeunesse par année. C'est un montant significatif. »

Il a indiqué que la ministre déléguée aux Services sociaux, Lucie Charlebois, mettra en application « la plupart des recommandations » du vérificateur.

De son côté, le ministre de la Santé, Gaétan Barrette, balaie d'un revers de main les critiques d'André Lebon au sujet de la « désorganisation des services sur le terrain » causée par sa réforme des structures du réseau de la santé. Des « joueurs clés » dans des projets-pilotes qui ont réduit le nombre de fugues à Montréal ont changé de poste ou « sont submergés dans de nouvelles tâches élargies », selon M. Lebon.

« Je ne pense pas que [la réforme] ait eu un impact dans les centres jeunesse ni ailleurs au Québec », a dit M. Barrette. Quelque 1140 cadres ont quitté le réseau ou annoncé leur départ à ce jour. Québec est près de sa cible de 1300. « Ces cadres-là sont dans une vaste majorité dans le milieu hospitalier. Je n'ai aucune indication à l'effet que le changement du taux d'encadrement ait eu un impact dans les centres jeunesse », a soutenu le ministre.