Le gouvernement du Nunavut estime qu'il n'a aucune raison de négocier une redéfinition de ses frontières avec le Québec, a indiqué une porte-parole.

Le premier ministre du territoire, Peter Taptuna, a décliné une demande d'entrevue concernant les demandes présentées récemment par le Québec, qui souhaite élargir sa juridiction.

Mais dans une déclaration, son attachée de presse, Yasmina Pepa, a rappelé que les îles des baies James, Hudson et d'Ungava, au nord du Québec, sont sous la juridiction du Nunavut.

Mme Pepa a affirmé que la Loi sur le Nunavut consacre cet état de fait depuis la création du territoire en 1999.

Dans une lettre adressée en août dernier aux chefs fédéraux, le premier ministre du Québec, Philippe Couillard a écrit qu'il était «urgent» pour le Québec d'élargir ses frontières nord, qui se terminent actuellement à la limite des eaux, ce qui pourrait compliquer le développement économique et la construction d'infrastructures.

Le Québec souhaite que les îles côtières et une partie des mers septentrionales soient rattachées à son territoire «afin d'obtenir une frontière plus appropriée et de corriger les difficultés liées à la configuration actuelle de la frontière».

La semaine dernière, le ministre des Affaires intergouvernementales Jean-Marc Fournier s'est montré confiant d'obtenir un amendement constitutionnel à ce sujet, à la suite de négociations avec les parties impliquées, dont le gouvernement fédéral.

Interpellé, le gouvernement du territoire du Nunavut a cependant montré peu d'intérêt à d'éventuelles discussions sur une modification de ses frontières.

«Nous ne voyons aucune raison pour recommencer des discussions sur les frontières spécifiques au Nunavut, a écrit Mme Pepa dans un courriel. Les frontières du Nunavut incluent les îles de la Baie d'Hudson, de la Baie James et de la Baie d'Ungava.»

La porte-parole a rappelé l'existence d'une entente conclue en 2009 avec les représentants des communautés cries et inuites du nord du Québec, qui accorde à leurs membres des droits sur les zones marines de la Baie James et la Baie d'Hudson.

«Le Nunavut a conclu des ententes territoriales complètes avec les Cris et les Inuits du Québec afin de préciser la juridiction gouvernementale sur ces îles ainsi que les droits des autochtones du Nunavut et du Québec relativement à ces îles», a-t-elle écrit.

En vertu de cet accord, conclu avec des représentants d'Ottawa et du Nunavut, le Grand conseil des Cris (GCC) et l'Administration régionale Kativik ont convenu d'un partage de la zone marine et des îles qui se trouvent dans les deux baies.

Les Cris et les Inuits ont obtenu des droits de propriété sur la quasi-totalité des îles (incluant leur sous-sol) ainsi que des droits sur l'utilisation de la zone marine, a expliqué Brian Craik, directeur des Relations fédérales du GCC.

Dans une entrevue, M. Craik a affirmé que les Cris sont intéressés à participer aux discussions qui pourraient survenir dans ce dossier à la demande du Québec.

«S'il y a des changements à faire ou des limites à décrire, je pense que les Cris pourraient toujours faire quelque chose comme ça, a-t-il dit. On n'a pas négocié les limites du Québec dans le traité, c'est seulement la moitié est de la Baie James qui est attribuée aux Cris.»

M. Craik a estimé qu'au-delà des impacts environnementaux de projets éventuels sur la faune, les Cris auraient peu à perdre d'une redéfinition des frontières.

«Est-ce qu'ils perdraient quelque chose? Je ne pense pas, qu'ils pourraient perdre grand-chose», a-t-il dit.

Aucun représentant de l'Administration régionale Kativik (ARK) n'a souhaité accorder d'entrevue à ce sujet.

«L'ARK n'émettra pas de commentaire concernant la possibilité d'un amendement constitutionnel tel que proposé par le gouvernement du Québec», a indiqué son service des communications dans un courriel.

Jusqu'ici, aucun représentant fédéral n'a donné suite à la demande d'élargissement des frontières du Québec, que M. Fournier souhaite relancer grâce à l'élection d'un nouveau gouvernement à Ottawa.

Dans sa lettre aux chefs fédéraux, à l'occasion de la campagne électorale, M. Couillard avait souligné l'importance de revoir les frontières nord afin d'éliminer toute entrave aux projets de développement économique qui pourraient survenir dans le cadre du Plan Nord et de la Stratégie maritime.

La société minière Oceanic Iron Ore, qui cherche actuellement un partenaire financier pour son projet d'exploitation d'un gisement de minerai de fer, prévoit la construction d'un port en eaux profondes, près d'Aupaluk, dans la Baie d'Ungava.

Son président, Alan Gorman, a cependant indiqué qu'il n'avait jusqu'ici rencontré aucun problème de juridiction pour la construction de l'infrastructure, qui se retrouverait pourtant théoriquement dans le territoire maritime du Nunavut.

«Nous sommes impliqués seulement avec le gouvernement du Québec pour ça», a-t-il dit.

De son côté, l'Association minière du Québec a expliqué qu'aucun membre du regroupement n'a soulevé de problème relatif aux juridictions maritimes dans le nord du Québec.

«Pour l'Association ce n'est pas un dossier qu'on a traité ou qu'on pense traiter prochainement», a-t-il dit le porte-parole Mathieu St-Amant.