«Estomaquée» par les intentions du ministre Pierre Moreau, la présidente de l'Union des municipalités du Québec, Suzanne Roy, a tenté en vain, hier, de le faire reculer sur les sanctions contre Laval et Longueuil.

La Presse a révélé hier que Pierre Moreau entend amputer leurs transferts d'environ 12 millions de dollars, afin de rembourser aux contribuables fonciers la part des hausses de taxes que les deux villes imputent aux compressions du gouvernement. Il était on ne peut plus clair à ce sujet lors d'un entretien avec La Presse: «C'est ce qu'on va faire. Je vais vous revenir là-dessus très prochainement», disait-il. On a appris que le remboursement se fera par l'entremise de la déclaration de revenus, l'an prochain. D'autres villes de la couronne de Montréal seraient également visées par la mesure.

Questionné par la presse parlementaire, hier, Pierre Moreau s'est fait subitement moins catégorique. «Le dossier est en analyse. Il n'y a pas de décision de prise», s'est-il contenté de dire. Il a téléphoné à la mairesse de Longueuil, Caroline St-Hilaire, pour lui transmettre le même message.

«J'ai lu dans le journal que les deux maires sont disposés à discuter du dossier. Je salue cette ouverture, et ça va me faire plaisir de discuter avec eux dès que l'occasion le permettra», a ajouté M. Moreau devant les caméras.

Suzanne Roy s'est entretenue avec le ministre hier. Elle lui a demandé de ne pas mettre ses menaces à exécution. «Ça va à l'encontre de l'autonomie municipale», estime-t-elle.

Mais le ministre n'a pas bronché. Il est resté ambigu. Il lui a dit que des «fuites» sont à l'origine du texte de La Presse. «Ça ne m'a pas nécessairement rassurée... S'il y a des fuites, c'est qu'il planche là-dessus!, a lancé Suzanne Roy. Je ne comprends pas que des fonctionnaires travaillent sur ça actuellement. Je lui ai dit que ça n'a pas de bon sens. Le gouvernement nous parle d'autonomie municipale, mais il ne faut pas juste en parler! Il faudrait que ça se concrétise avec des gestes. Et le premier geste qu'il faut faire, c'est de respecter les choix budgétaires des municipalités.»

Surprise

La mairesse de Sainte-Julie se dit d'autant surprise qu'elle croyait que la page était tournée. Lors d'une rencontre avec le ministre Moreau plus tôt cette année, «on avait eu des discussions à l'effet qu'il était mieux, pour nos relations et pour négocier le nouveau pacte fiscal, de passer à autre chose. On n'avait pas eu un engagement formel à l'effet qu'il recule, mais on avait compris qu'on se concentrait vraiment pour l'avenir.»

Elle a relevé que le premier ministre Philippe Couillard semble plus enclin au dialogue et «tourné vers l'avenir». «La bonne nouvelle, c'est qu'autant la mairesse de Longueuil que le maire de Laval disent vouloir discuter avec le gouvernement, avec le ministre, dans le cadre du nouveau pacte fiscal, parce qu'il faut voir à long terme», a-t-il dit lors de la période des questions à l'Assemblée nationale. Le prochain pacte fiscal «ne sera pas imposé, mais sera négocié avec les municipalités».

De son côté, le maire de Montréal, Denis Coderre, déplore à la fois les choix budgétaires de Laval et de Longueuil et les intentions du ministre. «Je ne suis pas d'accord avec la façon dont [Longueuil et Laval] n'ont pas utilisé leurs surplus, mais ils ont le droit de le faire. C'est la population qui va juger. Mais je ne suis pas d'accord avec l'intention du ministre Moreau.»

- Avec la collaboration de Pierre-André Normandin