Le gouvernement libéral déposera une loi sur la neutralité de l'État qui devrait «s'accompagner de quelques articles susceptibles de donner plus d'outils à nos intervenants», a indiqué le premier ministre Couillard hier, au caucus de ses députés destiné à préparer la rentrée parlementaire du 10 février.

Il reste prudent quant à l'échéancier de la stratégie en deux volets: un projet de loi sur la laïcité de l'État qui sera déposé par la responsable de la Justice, Stéphanie Vallée, et un plan d'action plus large, où on parlera de lutte contre l'intégrisme, qui relève de Kathleen Weil, la responsable de l'Immigration.

Mais bien avant ces considérations sur la neutralité de l'État ou le fanatisme religieux, c'est de sécurité que tous les gouvernements du monde parlent aujourd'hui, a insisté M. Couillard, de retour d'un séjour à Londres, Bruxelles et Davos.

«C'est une mission primordiale d'un État, la sécurité. Revenant d'Europe, j'ai remarqué une grande préoccupation. Je dois souligner que nos forces policières sont en lien constant avec les forces fédérales, avec le SPVM. On ne négligera aucun effort pour assurer la sécurité des gens», a-t-il indiqué à Québec.

Couillard «insensible», dit Legault

Quelques instants plus tôt, le chef caquiste François Legault a accusé M. Couillard d'être «insensible» aux enjeux identitaires, ce qui le place selon lui en rupture avec la majorité des Québécois. Le «malaise» du premier ministre sur ces questions le confond. «Il faudrait qu'un psychiatre s'assoie avec lui et regarde ça. Mais moi, je suis mal placé pour dire d'où ça vient», a-t-il affirmé à Sorel-Tracy, où a lieu une réunion de deux jours du caucus de son parti.

Philippe Couillard a rappelé que son gouvernement s'était déjà engagé à déposer un projet de loi sur la neutralité de l'État, «un élément parmi d'autres sur un plan beaucoup plus vaste». «Il n'est pas exclu qu'il soit déposé au cours de la session parlementaire», a-t-il dit. Ses ministres Jean-Marc Fournier et Kathleen Weil s'étaient défilés en disant qu'il serait déposé «le plus vite possible, quand il sera prêt». Bien des élus libéraux s'en sont pris aux propos du chef intérimaire du PQ, Stéphane Bédard, qui, vendredi, soutenait que Philippe Couillard s'était «imprégné» des valeurs de l'Arabie saoudite pour y avoir travaillé quelques années.

Le plan d'action visera à «prévenir et détecter» les courants intégristes susceptibles de verser dans l'illégalité. «Beaucoup d'amalgames sont faits sur des concepts distincts, si on parle de terrorisme. L'intégrisme est une pratique religieuse poussée à l'extrême. Comment agir là-dessus? Il y a des dispositions du Code criminel, sur les jeunes, les femmes, le discours haineux», a rappelé M. Couillard.

Autre sujet de discorde

Les chefs libéraux et caquistes se sont échangé des pointes sur un autre front: l'économie. Pour M. Legault, Philippe Couillard a «menti» aux Québécois et les a bercés de «faux espoirs» en promettant la création de 250 000 emplois en cinq ans au cours de la campagne électorale. Il lui demande de présenter une nouvelle cible de création d'emplois et de déposer un plan pour l'atteindre.

Il en a remis une couche en soirée devant une centaine de militants de la circonscription de Richelieu, où sera déclenchée une élection partielle d'ici la fin mars. Comme dans Lévis en octobre, les électeurs «vont avoir la chance de le dire à Philippe Couillard: dans Richelieu, se faire remplir, on n'aime pas ça!», a-t-il lancé.

M. Legault a souligné que le Québec a perdu 18 000 emplois depuis l'élection des libéraux. Et, selon les prévisions de Desjardins, seulement 78 000 emplois devraient être créés d'ici la fin de 2018.

Philippe Couillard rejette les accusations de François Legault. «Le dollar plus bas, le prix du pétrole plus bas vont favoriser notre secteur manufacturier. On a déployé 1,6 milliard pour favoriser le secteur manufacturier, pour l'innovation, la transition énergétique. Le Québec est bien placé pour en profiter», a-t-il affirmé.