À chacun sa passion, mais celle-là, elle est vraiment spéciale: un député de l'Assemblée nationale est éleveur de chevaux miniatures!

L'idée a germé pendant La semaine verte, raconte Gaétan Lelièvre, député péquiste de Gaspé. C'était en 2007, cinq ans avant son saut en politique.

Le reportage, toujours accessible sur le web, porte sur un couple d'éleveurs de chevaux miniatures. Des «Falabella», nom tout désigné pour ces petites bêtes qui ont l'air de sortir d'un conte de fées. Le monsieur s'extasie devant une femelle «extrêmement bien moulée» avec ses «belles fesses rondes». La dame berce un cheval en lui fredonnant une chanson. Gaétan Lelièvre a craqué, lui qui a déjà eu un cheval d'équitation. Directeur général de la Ville de Gaspé à l'époque, il a vu là une occasion de renouer avec les équins.

«J'ai vu le reportage, et j'ai pris de l'information. Je me suis rendu compte que les chevaux miniatures sont très peu connus au Québec. On a acheté un premier couple et, finalement, on s'est construit une fermette à Gaspé. On est devenus éleveurs.» C'est une façon originale de mettre en pratique une maîtrise en développement régional!

Pas des poneys

Il ne faut pas confondre les chevaux miniatures avec les poneys, plus gros, prévient-il. Les Falabella pèsent en moyenne entre 150 et 250 livres. Ils mesurent moins de 34 pouces au garrot. «C'est plus petit qu'un bouvier bernois ou un saint-bernard.» La race Falabella est née en Argentine, vers la fin du XIXe siècle. Elle est issue d'un croisement de poneys et de petits pur-sang. Elle a été baptisée du nom de la famille qui l'a conçue.

Les chevaux miniatures sont des animaux de compagnie. À condition d'avoir pour toit autre chose qu'un 4 au troisième. «Tu fais un enclos de 20 pieds par 20 pieds, tu fais une grosse niche, et le cheval, il est heureux là-dedans! Ce n'est pas plus dur à garder qu'un chien, à la limite. Il y en a qui les rendent propres et les ont dans la maison!» Les chevaux miniatures sont même utilisés comme guides pour aveugles à la place des chiens.

«C'est très affectueux, ça ne mord pas, ça ne rue pas, ajoute-t-il, intarissable. Ça mange pratiquement rien, à peu près une balle de foin par semaine. Et comme ça, il y a moins d'excréments. Tout est miniature là-dedans!»

Alors après les poules, à quand des chevaux miniatures dans Rosemont? Les Falabella sont dans une zone grise en matière de réglementation, selon le député. «Il y a un beau débat à faire là-dessus. On dit qu'on n'a pas le droit d'avoir un cheval en ville. Mais c'est un cheval miniature qui pèse moins que certains chiens! Qu'est-ce qui empêcherait de le garder? Il est où, le problème?»

Gaétan Lelièvre a eu jusqu'à une douzaine de chevaux miniatures dans sa fermette. Il en a vendu et livré à Montréal et Québec, par exemple. Les clients sont surtout des personnes âgées «qui ont déjà eu des chevaux, mais n'ont plus la santé», des jeunes familles aussi.

Plus le cheval est petit, plus le prix est élevé. «Un 34 pouces au garrot, enregistré, peut se vendre entre 800$ et 1500$. Mais si vous avez un 26 ou un 27 pouces au garrot, il peut se vendre 5000$. Il y en a même qui se vendent de 30 000$ à 40 000$ sur le marché au Québec!»

Abandon du commerce

Lorsqu'il a fait le saut en politique, en 2012, Gaétan Lelièvre a dû abandonner le commerce à cause de l'exclusivité de fonction imposée aux ministres. Pauline Marois l'avait nommé à son cabinet comme responsable des Régions.

Malgré tout, Gaétan Lelièvre a conservé la fermette et quelques chevaux. «On a gardé nos préférés.» Dont l'étalon, Picasso. «C'est parce que c'est un petit chef-d'oeuvre. Il est bien découpé, blanc et noir.» Il a aussi deux femelles, Jade et Rose. La «famille» s'est agrandie le printemps dernier avec la naissance de deux bébés. «C'est un drôle de hasard: il y en a un qui est né le 22 avril, le jour de ma prestation de serment comme député, et le deuxième est né le 24 juin, à la Saint-Jean-Baptiste.»

La semaine, un ami qui fait garder ses chevaux en pension s'occupe de la fermette. Le week-end, le député prend le relais. «Jamais je ne me suis levé un matin en disant: ah, c'est de l'ouvrage, ça ne me tente pas. Au contraire, ça me fait du bien. J'ai une vie parlementaire en ville, et une autre différente en région, en plein air. Ça me permet d'avoir un équilibre.»

Gaétan Lelièvre

> 52 ans

> Député de Gaspé depuis 2012

> Directeur général de la MRC de la Côte-de-Gaspé de 2010 à 2012

> Directeur général de la Ville de Gaspé de 2001 à 2010