Québec pourrait abolir la clause de droits acquis qui permet à des pompiers volontaires ou à temps partiel d'être soustraits à l'obligation de mettre leur formation à jour, a déclaré vendredi la ministre de la Sécurité publique, Lise Thériault.

«On a des discussions avec l'Association des chefs en sécurité incendie», a-t-elle déclaré en entrevue avec La Presse Canadienne.

Mais avant toute chose, elle dit vouloir prendre connaissance des recommandations qui seront formulées par le coroner Cyrille Delâge qui préside l'enquête sur l'incendie tragique de L'Isle-Verte, lors duquel 32 personnes ont péri. Le travail de cette équipe de pompiers à temps partiel a été critiqué pour son intervention en janvier dernier dans une résidence pour personnes âgées. Plusieurs de ces pompiers n'avaient pas suivi leur formation de base ou n'avaient pas mis à jour leurs connaissances, ce qui est même le cas du chef pompier. Parce qu'ils avaient obtenu leur certification avant 1998, ils en étaient exemptés en vertu d'une «clause grand-père» de la loi, qui a rendu la mise à jour obligatoire.

Pour la ministre, les avancées technologiques font en sorte qu'il y a toujours des possibilités de se perfectionner. Elle donne en exemple les pinces de désincarcération qui n'existaient pas avant.

«Moi je pense que ce n'est pas parce qu'il y a des clauses grand-père qu'on ne doit pas se prévaloir de l'offre de formation qui est là», a-t-elle déclaré en entrevue.

Elle a d'ailleurs annoncé vendredi que le gouvernement du Québec rend disponibles près de 20 millions $ pour la formation des pompiers volontaires ou à temps partiel dans les petites municipalités.

Cette annonce avait déjà été faite dans le dernier budget du gouvernement, mais la ministre Thériault en a précisé les modalités vendredi matin à Louiseville, en Mauricie.

Le nouveau Programme d'aide financière pour la formation des pompiers volontaires ou à temps partiel sera doté d'une enveloppe de 19,5 millions $, répartis sur cinq ans, et l'argent est disponible «dès maintenant», a précisé la ministre.

Il vise à aider les petites municipalités - celles qui comptent moins de 200 000 habitants - qui ont difficilement les moyens de payer la formation de leurs équipes de sécurité incendie. L'objectif est de rendre les interventions des pompiers plus efficaces et sécuritaires.

Les pompiers volontaires ou à temps partiel sont la réalité des petites villes et des villages du Québec. Les pompiers à temps plein, dont la formation est payée par le ministère de l'Éducation, se retrouvent surtout dans les centres urbains.

La subvention peut s'appliquer à une gamme de formations, dont celle de base appelée «pompier 1», mais aussi certains cours spécialisés comme «matières dangereuses», «opérateur d'autopompe» et «désincarcération».

L'aide permettra notamment de payer les frais d'inscription, la formation, les livres et le matériel d'apprentissage.

Jusque-là, la formation des pompiers volontaires était entièrement assumée par les municipalités régionales de comté (MRC) ou par les petites municipalités elles-mêmes, a rappelé la ministre. Le programme sera un «incitatif», croit-elle.

Surtout que de cinq à sept pour cent des pompiers volontaires et à temps partiel prennent leur retraite chaque année. Bon an mal an, cela fait 800 nouveaux pompiers à former, estime Mme Thériault.

Cette décision d'aide au financement des formations ne découle pas du drame de L'Isle-Verte, a dit la ministre. C'était un combat mené depuis plus de 30 ans par Daniel Brazeau, le président de l'Association des chefs en sécurité incendie du Québec.

Celui-ci était présent à Louiseville - et soulagé de cette annonce de fonds.

«On vient de lancer un revolver de départ. Ça commence à matin. On ne peut plus dire «Ah ben, on n'a pas de formation, on ne va pas la suivre parce qu'on n'a pas de financement'», a-t-il soutenu.

Les audiences du coroner sur L'Isle-Verte se poursuivent la semaine prochaine à Rivière-du-Loup.

«La formation des pompiers, c'est le nerf de la guerre, a lancé la ministre en entrevue. Quand on combat des incendies, chaque seconde compte. À partir du moment où ils (les pompiers) sont le mieux formés possible, ils sont en mesure de faire des interventions plus rapides, et tant mieux, on va sauver des vies.»

La Fédération québécoise des municipalités (FQM) a bien accueilli la nouvelle.

«Ce nouveau programme d'aide vient confirmer l'importance de la formation aux pompiers volontaires et les nombreux besoins dans le domaine afin de les former adéquatement», a affirmé Richard Lehoux, président de la FQM, dans un communiqué.

Au Québec, selon les plus récentes données de 2012 du ministère de la Sécurité publique, il y avait 5407 pompiers et officiers à temps plein pour 7633 à temps partiel et 10 200 volontaires.