La rencontre entre les représentants des quatre grandes centrales syndicales et les responsables de la Commission de révision permanente des programmes, lundi, a finalement eu toutes les apparences d'un dialogue de sourds.

Si le président du Conseil du trésor, Martin Coiteux, a dit avoir «tendu les deux mains» à ses interlocuteurs, les dirigeants de la FTQ, de la CSN, de la CSQ et de la CSD ont pour leur part eu l'impression de parler «devant un mur».

«On craignait le monologue social, c'est exactement cela qui s'est passé, a déploré le président de la CSN, Jacques Létourneau, au terme de l'audience. Il n'y a pas d'espace pour avoir un dialogue social. C'est très inquiétant.»

S'ils n'ont rien contre le retour au déficit zéro, les quatre représentants syndicaux - qui affirment représenter plus d'un million de travailleurs - sont cependant convaincus que l'empressement du gouvernement Couillard à rééquilibrer les finances publiques sera au final néfaste pour la qualité des services publics.

Leurs doléances n'ont toutefois pas fait fléchir M. Coiteux, qui refuse de repousser le retour à l'équilibre budgétaire prévu pour l'année financière 2015-2016.

«Ils (les représentants) souhaitent que le retour prenne plus de temps (...) sans préciser de date, a-t-il souligné, après la rencontre. Avec chaque année perdue pour y retourner, la dette augmente, et, lorsqu'on va devoir rétablir l'équilibre budgétaire, ça va être beaucoup plus difficile.»

Questionnés sur cet aspect de la rencontre, les représentants syndicaux n'ont pas voulu s'avancer sur un échéancier de retour au déficit zéro.

«Si on le fait rapidement (...) on va sabrer dans les services publics, a rappelé le président de la FTQ, Daniel Boyer. Deux ans, trois ans cinq ans, je ne le sais pas. Il ne faut pas mettre en péril ce qui nous est cher.»

Se disant «réalistes» et «sceptiques» quant à leurs attentes, les représentants de la FTQ, de la CSN, de la CSQ et de la CSD avaient accepté de participer à la rencontre parce qu'ils estimaient avoir un «message à faire passer».

«Si nous sommes ici, c'est parce que nous avons une croyance profonde, sans (nécessairement) avoir la conviction profonde de changer quelque chose», avait observé la présidente de la CSQ, Louise Chabot.

Également avant la rencontre, le président de la FTQ avait reproché au gouvernement Couillard de travailler «à l'envers» dans sa volonté de récupérer 3,2 milliards $ grâce à la commission.

«On nous oblige à atteindre des cibles pour réaliser des coupures, avait observé M. Boyer. On devrait plutôt s'attarder à ce que l'on veut comme services, déterminer combien cela coûte et comment le financer.»

De son côté, M. Létourneau, a rappelé qu'il faut remonter à l'époque du gouvernement péquiste de Lucien Bouchard pour avoir une idée de l'ampleur de compressions similaires.

«Nous avons fermé des hôpitaux (...) en plus de rouvrir des conventions collectives dans le secteur public, a-t-il dit. Pour aller chercher autant d'argent, ça passe par davantage qu'une réorganisation administrative des programmes.»

Mobilisation automnale

Visiblement déçus de l'issue de l'audience, les dirigeants syndicaux ont dit vouloir prendre le temps de discuter entre eux, mais cela ne les empêche toutefois pas de s'attendre à un automne chaud au Québec.

«C'est sûr qu'il va y avoir une réaction, c'est inévitable, a dit M. Létourneau. C'est clair qu'il va y en avoir une, il y en a déjà dans le secteur municipal avec (le projet de réforme des) régimes de retraite.»

M. Boyer s'attend de son côté à ce que les projets d'austérité du gouvernement Couillard mobilisent à la fois les syndicats, les groupes sociaux ainsi qu'une grande partie de la population du Québec.

Il s'agissait de la première rencontre entre M. Coiteux et les représentants des centrales syndicales en ce qui a trait à la révision des programmes. Un entretien visant à discuter du renouvellement des conventions collectives dans le secteur public avait toutefois eu lieu la semaine dernière.