Les finances publiques du Québec sont dans un état lamentable, une situation aussi «alarmante» que celles de 1982 et 1997, deux moments de crise qui avaient forcé le gouvernement à poser des gestes percutants pour juguler le déficit, a soutenu jeudi matin le premier ministre Philippe Couillard.

À ces deux moments, «il y a eu des décisions qui ont eu des conséquences difficiles malheureusement»; la situation est tout aussi alarmante actuellement, a fait valoir le premier ministre Couillard en marge du caucus de ses députés, au Manoir Richelieu, une réunion destinée à préparer la prochaine session parlementaire débutant à la mi-septembre.

En 1982, le gouvernement Lévesque avait opté pour une réduction de 20 % des salaires des fonctionnaires. En 1997, le gouvernement Bouchard avait opté pour des mises à la retraite massives, et «pelleté le problème par en avant», afin d'atteindre le déficit zéro, dira M. Couillard.

«On est éclairés par ces souvenirs, on a appris de cela...», a-t-il insisté. Se voulant rassurant, il évite de parler de coupures et évoque plutôt «des révisions de programme qui vont comprendre des changements budgétaires». Québec veut «concentrer les ministères sur les fonctions essentielles et restreindre au maximum tout ce qu'il y a comme soutien administratif», expliquera M. Couillard.

Les annonces difficiles viendront plus tard à l'automne, a-t-il soutenu, et le prochain budget du printemps 2015 sera aussi «un rendez-vous important». Il est resté bien vague sur un projet de fusion du ministère des Relations internationales; pas question de réduire le rayonnement international du Québec, a-t-il soutenu. M. Couillard doit se rendre en Chine, au Sénégal et à Paris dans les prochains mois.

Évoquée par M. Couillard, la révision des paliers administratifs rejoint la réforme de la gouvernance qu'on met de l'avant du côté de la santé. Pour le ministère de Gaétan Barrette, les propositions de réorganisation des établissements de santé étaient prévisibles, «quand je suis arrivé en poste tout le monde savait qu'on irait dans ce sens», a-t-il soutenu commentant la nouvelle de La Presse, jeudi.

«Quand j'ai pris connaissance de la situation budgétaire du Québec, j'ai rapidement demandé au réseau de faire des recommandations pour arriver à des économies», a-t-il déclaré. C'est près de 220 millions d'économies qui sont attendues de ces réorganisations. Il a insisté pour souligner que la réforme rapportée par La Presse, «est le fruit des réflexions des agences», qui seront annoncées formellement d'ici deux semaines, a-t-il indiqué.

Le ministre Barrette assure qu'aucun projet de compression ne réduira les services aux citoyens, les agences de la santé sont orientées sur des fusions et ce réaménagement nécessitera à coup sûr que le gouvernement légifère, a-t-il dit. 

Le choix du site du Manoir Richelieu pour réunir un gouvernement à la recherche de coupures à faire a soulevé des questions. Pour Philippe Couillard, les organisateurs ont eu à répondre à ces questions et ont démontré que le somptueux hôtel proposait les meilleurs prix, étant donné que la décision de tenir la réunion dans Charlevoix était prise, a-t-il expliqué. Organisée par le bureau du whip du gouvernement, la réunion est défrayée à même les fonds publics. 

Martin Coiteux, le président du Conseil du trésor, le chef d'orchestre des compressions, a lui aussi eu à justifier le choix du Manoir Richelieu pour la tenue de la réunion. Responsable de la Famille, Francine Charbonneau a souligné que le gouvernement est en réflexion devant l'ampleur des coûts du réseau des garderies et des congés parentaux, «tout est sur la table», a-t-elle laissé tomber, devant les questions qui se multipliaient. 

Pour le ministre de l'Éducation, Yves Bolduc, il s'agit au caucus spécial de Charlevoix d'avoir une «discussion générale sur les orientations» à prendre pour atteindre l'équilibre budgétaire. «Il faut prendre des décisions qui parfois peuvent être difficiles», convient-il. L'évaluation des enseignants envisagée par le ministre, décriée par les syndicats, n'est pas une mesure pour arriver à des économies, «ce n'est pas punitif, c'est pour améliorer le système», a-t-il souligné, rappelant qu'un rapport récent (Champoux-Lesage) avait préconisé une telle évaluation des professeurs. «On est à l'état de réflexion, ce n'est pas demain matin qu'on fera ça... », a-t-il soutenu.