Le livre blanc sur l'avenir du Québec sera un moyen de promouvoir la souveraineté et de démontrer les «échecs» du fédéralisme, ont déclaré des ministres péquistes hier. Pauline Marois a tenté de corriger le tir en se défendant de vouloir présenter un «livre noir» sur le Canada et d'imposer son option.

Le gouvernement a envoyé des signaux contradictoires, hier, sur ce livre blanc que la première ministre a promis de déposer si elle est reportée au pouvoir. Le dépôt du livre blanc serait suivi d'une vaste consultation. La formule n'a pas encore été arrêtée, mais Mme Marois a évoqué le modèle d'une consultation itinérante à l'image de la commission Bélanger-Campeau de 1990.

La première ministre refuse de s'engager à tenir un référendum dans un prochain mandat et maintient qu'il aura lieu «au moment approprié». Elle garde toutes les portes ouvertes. «Nous aurons une consultation avec le livre blanc, je suis souverainiste et quand les personnes m'élisent, moi et mon gouvernement, j'ai la possibilité de faire la souveraineté», a-t-elle déclaré à la clôture de la réunion de son caucus en prévision du retour à l'Assemblée nationale, mardi.

Contradictions

Devant ses militants, mercredi soir, Pauline Marois a expliqué qu'avec le livre blanc, «chacune des options», «demeurer une province ou devenir un pays», serait étudiée. Il ne faut pas présumer des conclusions de la consultation, disait-elle. Or des ministres ont clairement présenté l'exercice comme une promotion de la souveraineté.

Pour Pierre Duchesne, ministre de l'Enseignement supérieur, ce sera un exercice de «pédagogie» sur la souveraineté. Il a même ajouté que «le livre blanc, c'est de se donner les plans du pays». Le ministre délégué aux Affaires intergouvernementales, Alexandre Cloutier, a déclaré que livre blanc mettra en relief les «échecs» du fédéralisme.

«L'idée n'est pas de faire un livre noir» sur le Canada, s'est défendue Pauline Marois. «Ce n'est pas une démarche sur la souveraineté, c'est un livre blanc sur l'avenir du Québec qui fait état des avantages et des inconvénients de la situation dans laquelle nous nous trouvons maintenant dans nos relations avec Ottawa. [...] L'exercice sera rigoureux en termes d'avantages et d'inconvénients, où en est le Québec en 2014, 2015, 2016, selon le moment où ce sera présenté.»

Selon elle, «comme chef de gouvernement», elle a la responsabilité «d'éclairer le débat», «de mettre sur la table l'ensemble des évaluations». Mais «c'est au Parti québécois de faire la promotion de la souveraineté» et de «faire la démonstration» de la pertinence de cette option, a-t-elle dit, insistant sur cette distinction.

Élections sans budget?

Pauline Marois garde la porte grande ouverte à l'idée de lancer un appel aux urnes dans les prochaines semaines. Et «il est possible d'aller en élections sans budget», a-t-elle indiqué.

Elle a plaidé que «les chiffres n'ont pas changé» depuis la mise à jour économique et financière déposée à la fin novembre. Dans ce contexte, «on n'apprendrait pas grand-chose avec un budget», selon elle.

«Les grands paramètres sont exactement les mêmes. On a fixé les niveaux de déficit pour cette année, l'an prochain, le retour à l'équilibre budgétaire pour 2015-2016, et les prévisions semblent se confirmer avec les prévisionnistes du secteur privé. Donc, déjà, c'est une base très solide d'informations disponibles pour la population», a-t-elle expliqué.

Elle pourrait donc déclencher des élections avec ou sans budget, car «toutes ces situations se sont vues dans le passé». Or lors des élections du 14 avril 2003, le gouvernement Landry avait déposé un budget avant de partir en campagne - Mme Marois était ministre des Finances. Et la veille du déclenchement des élections de 2007, le 20 février, le gouvernement Charest avait lui aussi présenté un budget. La Presse a révélé mardi que le gouvernement et la machine du Parti québécois travaillent à un scénario d'élections déclenchées autour du 12 mars pour un scrutin le 14 avril.

Pauline Marois affirme qu'elle n'a pas le choix de faire fi de sa propre loi sur les élections à date fixe, car l'opposition menace de renverser son gouvernement minoritaire lors du vote sur le budget. Le respect de la loi doit «se jouer des deux côtés de la Chambre», a-t-elle soutenu. Et comme l'opposition pourrait ne pas tenir compte de la loi, «je veux garder la même latitude, sinon c'est vraiment deux poids, deux mesures, et je ne suis pas à armes égales». Elle se «réserve le droit» de déclencher des élections en tenant compte du «climat» à l'Assemblée nationale. Elle a d'ailleurs insisté longuement sur les «blocages importants» faits par l'opposition.

Selon la loi sur les élections à date fixe, les élections générales auraient lieu, en principe, le 3 octobre 2016.