Pauline Marois assure que son conjoint n'a jamais conclu d'entente avec la Fédération des travailleurs du Québec (FTQ) pour protéger les intérêts de la centrale syndicale.

La première ministre a affirmé d'un même souffle, mercredi, ne pas avoir subi de pression de la part des dirigeants de la FTQ pour la dissuader d'appuyer la tenue d'une enquête publique dans l'industrie de la construction.

À Davos, où elle participe au Forum économique mondial, Mme Marois a rétorqué aux partis d'opposition à Québec qui font leurs choux gras des écoutes électroniques déposées en preuve, mardi, devant la commission Charbonneau.

«Il n'y a pas d'entente conclue, il n'y a pas de deal, comme ils disent», a lancé en s'esclaffant la première ministre, en point de presse, dans un hôtel de la station de ski des Alpes suisses.

Dans un enregistrement effectué par la police et entendu à la Commission Charbonneau, l'ancien président de la FTQ Michel Arsenault et l'ex-dirigeant de la FTQ-Construction Jean Lavallée discutent de la possibilité de rencontrer Mme Marois pour épargner la centrale de l'épreuve d'une enquête.

Durant cette conversation qui remonte à 2009, M. Arsenault dit vouloir s'entretenir avec Mme Marois - alors chef de l'opposition - et fait référence à un «deal» passé avec son mari, Claude Blanchet, qui a dirigé le Fonds de solidarité de la FTQ de 1983 à 1997.

La première ministre, qui a attendu plusieurs heures avant de réagir à la controverse éclatée la veille, a soutenu qu'il n'y avait pas eu d'accord secret avec la FTQ et que les relations entre la centrale et son conjoint se limitaient à un «partenariat d'affaires».

Elle a fait valoir que les dirigeants de la FTQ avaient été rapidement informés des intentions du PQ de réclamer une enquête publique. Elle n'a pas voulu parler de propos mensongers, même si elle ne reconnaît aucun fondement aux allégations.

«Il n'y a pas eu de deal et il n'y a pas de deal. Il faudra leur poser la question à eux, moi je vous dit il n'y en a pas eu, il n'y en a pas, et j'ai pris la décision que nous demanderions une commission d'enquête peu importe ce qu'en pensait l'un ou l'autre groupe, que ce soit la FTQ ou d'autres», a déclaré Mme Marois.

«S'ils nous ont parlé, et ils nous parlent régulièrement, ça ne doit pas avoir donné les résultats escomptés puisque nous avons demandé la commission d'enquête et j'en ai informé Michel Arsenault assez rapidement. C'est sûr qu'il n'était pas d'accord mais il n'a pas fait de pression sur moi», a-t-elle ajouté.

Soupçonneuse, la Coalition avenir Québec (CAQ) a fait remarquer que le Parti québécois avait mis six mois avant d'emboîter le pas à la défunte Action démocratique, première formation politique à avoir réclamé une commission d'enquête en avril 2009.

Scepticisme à Québec

La députée Sylvie Roy est même allée jusqu'à réclamer mercredi un témoignage de Claude Blanchet devant la Commission Charbonneau.

«L'écoute électronique semble dire qu'il y a beaucoup plus que (le deal). On semble dire qu'on a un avantage pour faire pression sur la première ministre. Si Mme Marois ne le sait pas, lui devrait le savoir et il devrait s'expliquer», a-t-elle affirmé.

Les libéraux se sont aussi inquiétés des «pressions» qui auraient pu être exercées sur Mme Marois par la FTQ.

«Je trouve la réponse de Mme Marois encore plus troublante. Peut-être qu'elle a une version mais que ce n'est pas la bonne. Ça pousse ma réflexion plus loin: qui dirige vraiment le Québec?», a lancé la députée libérale Lise Thériault.

Le président du Conseil du Trésor, Stépane Bédard, s'est à nouveau porté à la défense de la première ministre, mercredi.

«Mme Marois, elle est inébranlable. Peu importe les représentations qu'elle aurait eues, il y a une chose qui est sûr, c'est que cette commission d'enquête, elle l'a réclamée et a pris tous les moyens pour l'obtenir.»

Plus tôt dans la journée, Mme Marois avait tenu à nuancer les liens de proximité qui unissent la centrale avec le Parti québécois.

«Vous aurez remarqué que dans les deux dernières élections, alors que la FTQ habituellement prenait position et appuyait le Parti québécois, ce ne fut pas le cas dans les deux dernières occasions où je me suis présentée comme chef du Parti québécois (et) pour devenir première ministre du Québec. Nous avons des rencontres régulières, comme j'en ai avec le Conseil du patronat et d'autres groupes», a-t-elle dit.

Après s'être fait tirer l'oreille pendant plus de deux ans, l'ancien premier ministre Jean Charest a mandaté la Commission Charbonneau en novembre 2011. La FTQ s'opposait à cette démarche.