Ils ont été élus pour la première fois en 2012. Un an plus tard, quatre députés, issus de tous les partis représentés à l'Assemblée nationale, font le point sur leur expérience. La période des questions les frustre, la lenteur des travaux parlementaires aussi. Ces petits nouveaux ont des idées pour réformer l'Assemblée nationale. Et ils reconnaissent, non sans peine, quelques erreurs.

HÉLÈNE DANEAULT - Députée de Groulx (CAQ), 52 ans

La vie politique correspond-elle à ce que vous aviez imaginé?

Après avoir oeuvré en politique municipale, j'avoue avoir eu un choc en arrivant au niveau provincial. J'ai l'impression de me retrouver, par moments, à l'époque de la Nouvelle-France: la lenteur des travaux m'exaspère. J'ai le sentiment que la réalité des travaux parlementaires ne s'est pas adaptée à l'ère des nouvelles technologies.

Qu'aimez-vous dans la vie de députée?

Le sentiment de pouvoir améliorer les choses et mettre à profit tant mon expérience professionnelle de médecin que celle de gestionnaire à titre d'ex-mairesse et, surtout, de citoyenne engagée depuis des années.

Que n'aimez-vous pas dans la vie de députée?

La lenteur des travaux parlementaires. Je me suis toujours décrite comme une femme d'action et de solutions. J'ai donc du mal à m'asseoir de longues heures autour d'un seul sujet et d'une même table en répétant les mêmes arguments.

Comment vivez-vous avec la ligne de parti?

La vie est faite de compromis. Pour ma part, je n'ai aucun problème à me rallier à la position commune prise au sein du caucus. Je suis d'abord une femme d'équipe. Si la décision rendue n'est pas la mienne, c'est que je ne suis pas parvenue à convaincre mes collègues. Mea culpa!

Que feriez-vous pour améliorer le fonctionnement de l'Assemblée nationale, que ce soit au Salon bleu ou en commission parlementaire?

J'avais un rêve (I had a dream), celui de voir le Salon bleu se transformer en un salon circulaire où tous les députés travailleraient en collaboration à trouver des solutions pour faire avancer le Québec, et ce, de façon non partisane, au lieu de l'actuelle configuration des lieux, qui crée un climat d'affrontement néfaste pour l'avancement du Québec.

Sur quel dossier avez-vous particulièrement aimé travailler jusqu'ici, et pourquoi?

Le projet de loi 52 concernant les soins de fin de vie. Il introduit une toute nouvelle notion d'aide médicale à mourir qui permettra désormais à toute personne en fin de vie, majeure et apte à consentir, de recourir à ce nouveau type de soins peu accessible ailleurs dans le monde. Je suis heureuse d'avoir pris part à ce processus démocratique qui se déroule dans le respect et la collaboration de tous les acteurs impliqués.

Quel est votre bon coup ou la réalisation dont vous êtes la plus fière jusqu'ici?

Avoir sonné l'alarme dans le dossier de la gestion du CHUM, au moyen d'une commission parlementaire qui nous aura permis de faire la lumière sur plusieurs irrégularités au sein de la direction générale et du conseil d'administration. Cela permettra, je l'espère, de revoir les modes de gouvernance afin de nous assurer d'une rigueur accrue au sein même du réseau de la santé.

Quelle décision ou quelle position regrettez-vous d'avoir prise comme députée ou comme parti? Quel est votre moins bon coup?

Notre manière de communiquer nos propositions en campagne électorale sur la réduction de la taille de l'État. J'ai le sentiment que les gens ont eu peur qu'on abolisse des postes de façon arbitraire alors que, pour nous, il était clair que nous allions profiter des départs massifs à la retraite des employés de l'État afin d'en réduire la taille.

Photo Ivanoh Demers, La Presse

Hélène Daneault

JEAN ROUSSELLE - Député de Vimont (PLQ), 60 ans

La vie politique correspond-elle à ce que vous aviez imaginé?

Oui, en tous points, même si cela s'avère un peu plus intense que ce que je pensais.

Qu'aimez-vous dans la vie de député?

Aider les gens. Les gens qui me connaissent depuis mon enfance dans Vimont me rencontrent aujourd'hui et me demandent: «Hé, Jean! Aimes-tu ça être député?» J'aime cette proximité avec les gens de ma cisconscription.

Que n'aimez-vous pas dans la vie de député?

Ne pas pouvoir aider les gens comme je le voudrais.

Comment vivez-vous avec la ligne de parti?

Sans problème. Le Parti libéral véhicule mes propres valeurs. En caucus, on peut dire ce qu'on pense à notre chef et à nos collègues. À ce jour, je n'ai jamais eu à voter contre mes convictions ou ma conscience.

Que feriez-vous pour améliorer le fonctionnement de l'Assemblée nationale, que ce soit au Salon bleu ou en commission parlementaire?

Il faudrait avoir une règle qui oblige le gouvernement à répondre aux questions posées d'une manière moins partisane. Cela devrait aussi s'appliquer lors de l'étude des crédits budgétaires qui ressemble à une longue période de questions plutôt qu'à un exercice de reddition de comptes.

Sur quel dossier avez-vous particulièrement aimé travailler jusqu'ici, et pourquoi?

Philippe Couillard m'a donné quelques mandats qui concernent le dossier de l'habitation, dont je suis le porte-parole. Je suis vite devenu accro, je consulte beaucoup de spécialistes et je lis tout ce qui me tombe sous la main.

Quel est votre bon coup ou la réalisation dont vous êtes le plus fier jusqu'ici?

Le 25 décembre dernier, au petit matin, trois familles de mon comté ont tout perdu dans l'incendie de leur logement. Pour leur venir en aide, j'ai lancé une collecte de dons. Avec mon personnel et la directrice du Service bénévole d'entraide de Vimont-Auteuil, Roselyne Forget, nous les avons aidées à se reloger, à se meubler et à se vêtir.

Quelle décision ou quelle position regrettez-vous d'avoir prise comme député ou comme parti? Quel est votre moins bon coup?

Bien sûr, j'aimerais pouvoir poser plus de questions en Chambre lors de la période de questions, mais avec le format limitant le temps des interventions, je comprends que nous devions prendre des décisions quant au choix des questions que nous posons. Mais il y a d'autres tribunes pour faire valoir les orientations du PLQ en matière d'habitation, et je les utilise!

Photo Ivanoh Demers, La Presse

Jean Rousselle

SUZANNE PROULX - Députée de Sainte-Rose (PQ), 54 ans

La vie politique correspond-elle à ce que vous aviez imaginé?

Oui et... non! En fait, même si je savais qu'il s'agissait d'un travail exigeant à tous les niveaux et que cela me demanderait un apprentissage en accéléré, le rythme effréné de mes journées est tout de même plus intense que je ne l'avais anticipé!

Qu'aimez-vous dans la vie de député?

J'aime la proximité avec les gens, j'aime travailler avec les groupes, j'aime sentir que je peux contribuer réellement à faire une différence dans ma communauté.

Que n'aimez-vous pas dans la vie de député?

Je n'aime pas le fait d'être toujours à court de temps. J'aimerais avoir des journées de 48 heures. Je n'aime pas la partisanerie à tout prix qui freine la collaboration entre les partis et entrave l'avancement de dossiers importants. Je trouve parfois très lourd tout le processus qui entoure l'étude des projets de loi et des travaux parlementaires.

Comment vivez-vous avec la ligne de parti?

Vous savez, la ligne de parti ne nous est pas imposée, elle est décidée par l'ensemble du caucus. Le Parti québécois est certainement un des plus ouverts en matière de débats! Nous avons de nombreuses discussions à l'interne et ces échanges nous permettent d'arriver à des consensus.

Que feriez-vous pour améliorer le fonctionnement de l'Assemblée nationale, que ce soit au Salon bleu ou en commission parlementaire?

Je remplacerais le format actuel de la période de questions! Il faudrait regarder dans d'autres Parlements à travers le monde comment s'effectue la reddition de comptes du gouvernement. Peut-on penser à un format qui générerait un climat plus objectif et propice à la tenue de cet important exercice démocratique?

Sur quel dossier avez-vous particulièrement aimé travailler jusqu'ici et pourquoi?

J'ai particulièrement apprécié de collaborer à l'étude du projet de loi concernant les soins de fin de vie et introduisant l'aide médicale à mourir. Ce projet touche directement la dignité des personnes mourantes et très souffrantes et je suis sensible à cette question. Le travail en commission parlementaire a été très respectueux des points de vue et des valeurs de chacun.

Quel est votre bon coup ou la réalisation dont vous êtes le plus fière jusqu'ici?

C'est d'avoir réussi à mobiliser la communauté pour parvenir à sauver le programme musical des écoles publiques de Laval. Je m'étais engagée auprès des parents à travailler très fort pour sauver ce joyau qui existe depuis 25 ans et permet à 800 élèves par année d'avoir accès à un enseignement musical de très haut calibre.

Quelle décision ou quelle position regrettez-vous d'avoir prise comme députée ou comme parti? Quel est votre moins bon coup?

Nous sommes partis en lions lorsque nous avons remporté les dernières élections. Nous avons été hyperactifs dans nos dossiers, nous avons voulu en faire trop en même temps. Notre empressement à mettre de l'avant notre programme politique nous a parfois amenés à agir trop rapidement, ce qui nous a attiré des critiques légitimes. Nous aurions dû mettre la pédale un peu plus douce au départ, nous évitant ainsi quelques maladresses!

Photo Ivanoh Demers, La Presse

Suzanne Proulx

FRANÇOISE DAVID - Députée de Gouin (QS), 65 ans

La vie politique correspond-elle à ce que vous aviez imaginé?

Oui, en plus intense!

Qu'aimez-vous dans la vie de députée?

Le travail en circonscription avec les gens de mon quartier. Le travail rigoureux et exigeant des commissions parlementaires. Le défi de travailler avec les médias.

Que n'aimez-vous pas dans la vie de députée?

La plupart du temps (mais pas toujours!), la période de questions.

Comment vivez-vous avec la ligne de parti?

J'ai l'habitude d'être porte-parole et cela me convient tout à fait. Par ailleurs, notre parti donne une bonne marge de manoeuvre à ses députés.

Que feriez-vous pour améliorer le fonctionnement de l'Assemblée nationale, que ce soit au Salon bleu ou en commission parlementaire?

Améliorer les droits des plus petites formations ou des députés indépendants, qui sont trop souvent soumis au bon vouloir des plus grosses formations politiques.

Sur quel dossier avez-vous particulièrement aimé travailler jusqu'ici, et pourquoi?

J'ai aimé plusieurs dossiers (pensions alimentaires, économie sociale, laïcité, assurance autonomie), mais celui du prix réglementé du livre neuf m'a vivement intéressée. Car j'ai beaucoup appris sur l'univers du livre, et comme j'adore les livres... Nos pressions sur le ministre ont porté leurs fruits.

Quel est votre bon coup ou la réalisation dont vous êtes la plus fière jusqu'ici?

Le dépôt d'une charte de Québec solidaire sur la laïcité comme réponse au projet péquiste. Je suis fière d'avoir pu démontrer qu'un projet de loi consensuel pourrait être adopté si les parlementaires s'attaquaient à ce dossier dans un esprit non partisan.

Quelle décision ou quelle position regrettez-vous avoir prise comme députée ou comme parti? Quel est votre moins bon coup?

Je regrette de ne pas avoir encore réussi à convaincre le gouvernement de régler l'injustice que vivent les mères monoparentales pauvres dont le revenu est coupé en raison de la pension alimentaire que reçoit leur enfant.

Photo Ivanoh Demers, La Presse

Françoise David