Les partis de l'opposition ont gardé le silence, jeudi, à la suite du dépôt par le gouvernement péquiste minoritaire d'un projet de loi sur les mines qui reprend certaines de leurs suggestions.

Exception faite de Québec solidaire, aucun député n'a fait de commentaire, plongeant l'Assemblée nationale dans un suspense parlementaire, alors que les péquistes souhaitent faire adopter le projet de loi 70 à toute vitesse, avant l'ajournement prévu vendredi.

Lors d'un point de presse qui a suivi le dépôt d'une version révisée de sa loi bloquée en octobre par l'opposition, la ministre des Ressources naturelles, Martine Ouellet, a assuré que sa proposition répond aux demandes de l'opposition.

«Je considère que l'essentiel est maintenu dans le projet de loi actuel, que nous avons fait des ajustements qui permettent d'avoir un projet de loi équilibré», a-t-elle dit.

Les représentants des ailes parlementaires libérale et caquiste ont affirmé que leurs équipes respectives examinent actuellement le document présenté par Mme Ouellet. Les députés de QS ont aussi réservé leur analyse pour plus tard, mais ils ont invité les péquistes à engager la confiance envers leur gouvernement minoritaire lors des votes sur le projet de loi.

Mercredi, la Coalition avenir Québec (CAQ) avait montré des signes d'ouverture pour procéder rapidement, mais les libéraux avaient signifié leur refus.

Jeudi, en Chambre, le leader parlementaire libéral Pierre Moreau a déclaré que les libéraux doivent déterminer si le texte respecte les conditions qu'ils ont fixées. M. Moreau a évoqué la possibilité d'étudier le projet de loi la semaine prochaine, ce qui nécessiterait de prolonger la session.

«Nous sommes disposés à procéder à l'étude, s'il remplit les conditions, dès la semaine prochaine, pour toute la semaine s'il le faut, et adopter ce projet de loi avant Noël», a-t-il dit.

À la presse parlementaire, Mme Ouellet a affirmé qu'elle a renoncé à une partie de son droit de veto sur les zones compatibles à l'exploitation minière, une des principales critiques formulées par la CAQ et les libéraux contre le précédent projet de loi 43, déposé en mai.

Comme dans la version précédente, les municipalités pourront décider quelles sont les zones compatibles ou non avec les activités minières. Le ministère des Ressources naturelles aura un avis à donner, mais il n'aura plus le pouvoir de changer les plans d'aménagements une fois qu'ils sont acceptés.

Mme Ouellet a déclaré que les entreprises minières devront donc s'adresser directement aux municipalités si elles souhaitent une modification.

«Le pouvoir qui avait été le plus critiqué était celui qui permettait au ministre des Ressources naturelles, a posteriori, après la mise en vigueur d'un schéma d'aménagement, de venir modifier les zones incompatibles, a-t-elle dit. Donc, ce pouvoir-là est retiré.»

La ministre a adouci sa position concernant l'évaluation des impacts environnementaux des activités minières. Plutôt que de soumettre tous les projets à ce processus, comme proposé dans le projet de loi 43, seuls ceux dont la capacité de production quotidienne s'élève à plus de 2000 tonnes seront visés.

L'Association minière du Québec et la CAQ avaient plutôt proposé de fixer ce seuil à 3000 tonnes.

Répondant à une préoccupation des libéraux, le projet de loi 70 détaille davantage les dispositions concernant la consultation des communautés autochtones, en proposant notamment d'élaborer une politique propre à ce sujet.

La ministre a aussi renoncé à exiger que les entreprises minières soumettent une étude de faisabilité de transformation de minerai, pour l'obtention d'un bail minier, limitant cette demande à une étude d'opportunité, moins coûteuse à réaliser.

Les libéraux réclamaient de connaître les orientations gouvernementales qui guideraient le ministère concernant l'aménagement du territoire, mais le document déposé jeudi est muet sur cet aspect. Mme Ouellet a déclaré qu'elle réserve ces précisions pour plus tard.

Le président de la Fédération québécoise des municipalités (FQM), Bernard Généreux, a affirmé que le projet de loi 70, quatrième tentative de réforme de la Loi sur les mines en quatre ans, est un compromis satisfaisant qu'il faut adopter rapidement.

M. Généreux a estimé que les dispositions prévues dans la proposition viendraient annuler la préséance des prérogatives des entreprises minières sur l'aménagement du territoire, une demande qui n'avait pas été satisfaite avec le projet de loi 43.

«On attend encore une contre-expertise, mais je pense qu'avec ça on est capable de faire un très bon bout de chemin, a-t-il dit. Avec le pouvoir de décider des zones incompatibles, ça force le dialogue, ça oblige à établir une relation avec le monde municipal.»

Québec meilleure mine, un regroupement écologiste, a constaté les reculs du gouvernement péquiste, mais souhaite néanmoins l'adoption de la loi le plus rapidement possible.

«C'est clair que la ministre a fait des pas dans la direction de la CAQ et des libéraux, a-t-il dit. À notre avis, les libéraux, sur le fond des choses, n'ont pas raison de vouloir bloquer ça.»

Le député de QS Amir Khadir a invité le gouvernement minoritaire à donner à l'adoption de cette loi toute l'ampleur qu'elle mérite en en faisant une motion de confiance, auquel cas une défaite plongerait le Québec en élection.

«Pourquoi, pour des milliards de richesses qui appartiennent aux Québécois, le vote sur un projet de loi qui mettrait la barre un peu plus haute en faveur des Québécois ne devrait pas être un vote de confiance?», a-t-il demandé.