Le commissaire au lobbyisme du Québec vient de trancher. Il y a bel et bien eu des activités illégales de lobbyisme à Saint-Bruno-de-Montarville, sur la Rive-Sud. Aucune sanction ne sera prise cependant, puisque l'infraction est maintenant prescrite.

Dans une lettre qu'il a fait parvenir lundi au maire de Saint-Bruno, Claude Benjamin, au sénateur Paul Massicotte et à son urbaniste Bruno Bergeron, le commissaire François Casgrain les informe des conclusions de son analyse menée au cours des derniers mois.

«L'analyse des informations obtenues lors des rencontres avec des titulaires de charges publiques de la Ville, le promoteur, Paul J. Massicotte, de Propriétés Sommet Prestige, ainsi qu'un urbaniste représentant le promoteur, a permis de constater que des activités de lobbyisme ont été exercées relativement au projet du Domaine de la Futaie, sans que l'objet de ces activités n'ait été porté au registre des lobbyistes», écrit le commissaire.

Me Casgrain écrit aussi que «les élus et les fonctionnaires de la Ville n'étaient pas complètement au fait des règles entourant les activités de lobbyisme, et par conséquent, n'étaient pas en mesure de bien gérer les communications d'influence qui ont été faites auprès d'eux.»

Mais le maire Benjamin persiste et signe. Il affirme qu'il n'a fait l'objet d'aucun lobby et que les fonctionnaires et lui sont «au fait de ces règles».

M. Benjamin admet néanmoins en entrevue que la Ville ne vérifie toujours pas si un promoteur est inscrit au Registre des lobbyistes avant de faire affaire avec lui. «Quelles garanties aurais-je de plus? Qu'il soit inscrit ou non, le promoteur va nous présenter le même projet.»

La politique de gestion contractuelle de la Ville suggère pourtant aux élus et aux fonctionnaires de faire cette vérification auprès du registre du lobbyiste.



Recommandations

Me Casgrain recommande à la Ville de participer à une formation sur le lobbyisme. Il invite aussi MM. Massicotte et Bergeron à s'inscrire «dans les plus brefs délais» au registre des lobbyistes.

Il signale qu'un manquement peut faire l'objet d'une poursuite pénale pouvant résulter en une amende de 500$ à 25 000$. Les deux hommes ne sont toujours pas inscrits au registre. Paul Massicotte n'a pas répondu aux appels de La Presse.

Fait à noter, en décembre 2006, la Ville avait retenu pour son nouveau plan d'urbanisme les services de la même firme à l'emploi de M. Massicotte, une décision critiquée par l'opposition. Le maire Benjamin avait répondu qu'il y avait eu un appel d'offres public et que l'entreprise choisie était le plus bas soumissionnaire.

Controverse autour d'un terrain boisé

Le sénateur Massicotte, qui est aussi promoteur immobilier, a acheté en mars 2006 un terrain adjacent au parc national du Mont-Saint-Bruno, dit le bois des Hirondelles, où il entend construire une trentaine de maisons de luxe. Au cours des dernières années, M. Massicotte a rencontré à deux reprises le maire de Saint-Bruno pour discuter de son projet. Depuis 2006, son urbaniste a eu aussi plusieurs échanges avec des représentants de la Ville.

En février dernier, La Presse révélait que le bureau du Commissaire au lobbyisme entendait poser des questions au maire Benjamin pour s'assurer que les élus et les fonctionnaires comprennent bien les règles établies par la Loi sur la transparence et l'éthique en matière de lobbyisme. Il disait aussi vouloir poser des questions sur le projet immobilier du sénateur Massicotte.

Quelques jours plus tard, par l'entremise de ses avocats, le maire servait une mise en garde au commissaire. Il affirmait ne pas voir en quoi la loi pouvait avoir été enfreinte.

Le maire Benjamin a annoncé en mai dernier qu'il ne serait pas candidat à sa réélection, le 3 novembre. C'est le conseiller Joël Boucher qui a été désigné comme candidat à la mairie de la formation politique du maire, l'Alliance municipale.