Inquiétée par l'aveu des patrons sur le travail au noir, la ministre du Travail, Agnès Maltais, mandate la Commission de la construction (CCQ) de récupérer les sommes cachées au fisc.

Le 28 juin, l'Association de la construction (ACQ), qui représente les patrons, écrivait à la première ministre Pauline Marois pour réclamer une loi spéciale afin de forcer les syndicats en grève à retourner au travail. L'ACQ expliquait notamment ne plus pouvoir payer les travailleurs en temps double lorsqu'ils reprennent la fin de semaine des travaux reportés à cause d'intempéries. Dans ces conditions, «il est impossible pour un employeur de rentabiliser un contrat», écrivait le président de l'ACQ Jean Pouliot. Les employeurs sont donc «la plupart du temps (...) contraints de faire travailler des salariés le samedi sans le déclarer aux autorités fiscales», avouait-il. L'ACQ soutient que même si ses membres veulent éviter le travail au noir, le «dogmatisme» des syndicats «rend l'honnêteté quasi impossible dans l'industrie».

La loi spéciale a été adoptée lundi et les quelque 77 000 travailleurs du secteur institutionnel, commercial et industriel sont retournés mardi matin sur les chantiers. La ministre Maltais surveillera les employeurs.

M. Pouliot «indique clairement» dans sa lettre que ses membres «ne déclarent pas toutes les heures travaillées» et que les dispositions des conventions collectives sur les heures supplémentaires ne sont pas toujours respectées, s'inquiète la ministre. Elle demande donc à la CCQ de «procéder aux vérifications nécessaires et d'intervenir pour qu'on récupère les sommes qui doivent l'être». «Tous les moyens doivent être mis en oeuvre», ajoute-t-elle, «même si cela signifie des vérifications auprès de toutes les entreprises concernées». La ministre n'a pas voulu répondre à nos questions mardi.

L'ACQ a aussi gardé le silence, en justifiant que la lettre ne lui était pas destinée.

Le travail au noir est par nature difficile à mesurer. Selon Revenu Québec et le ministère des Finances, environ 1,5 milliard de dollars échappent ainsi annuellement à l'État dans le secteur en construction. Selon la CCQ, la lutte à cette évasion fiscale porte ses fruits. 

De 1994 à 2011, le volume de travail déclaré augmente plus que celui de la valeur des travaux. On note une hausse de 76% du ratio d'heures rapportées par million de dollar investi, ce qui porte à croire que le travail au noir diminue.