Le gouvernement Marois accorde à Microsoft, sans appel d'offres, un contrat de 30 millions de dollars pour la mise à niveau des 76 000 postes informatiques des ministères et organismes. Il prolonge également d'un an un décret libéral qu'il dénonçait dans l'opposition et qui privilégie les multinationales de l'informatique au détriment des logiciels libres.

Ce sont «des mesures transitoires le temps d'introduire graduellement des solutions libres», a affirmé jeudi le président du Conseil du trésor, Stéphane Bédard.

Mercredi, le conseil des ministres a adopté deux décrets liés aux contrats informatiques. Le premier prévoit que le gouvernement achètera de Microsoft des logiciels de système d'exploitation et de suite Office pour les 76 000 postes informatiques des ministères et organismes. Cet achat lui coûtera 30 millions de dollars, mais des dépenses supplémentaires d'environ 50 millions seront nécessaires, notamment pour la formation. Bien des systèmes dans la fonction publique dépendent des technologies de Microsoft, a expliqué M. Bédard. Il a ajouté que la multinationale cessera en avril 2014 d'assurer le soutien technique de Windows XP et de la suite Office 2003. «Je l'ai constaté à mon arrivée: on n'était pas prêt à faire cette transition» vers les logiciels libres dès maintenant, a-t-il dit.

Le deuxième décret vise la prolongation de celui adopté par les libéraux en novembre 2011. Il permet la conclusion de contrats de gré à gré - et non par appel d'offres - avec dix fournisseurs (Adobe, IBM, McAfee, Microsoft, Novell, Oracle, Red Hat, SAS, Symantec et VMware). Québec prévoit des achats de licences pour une dizaine de millions de dollars au cours de la prochaine année en vertu de ce décret.

Stéphane Bédard a déjà annoncé la création d'un «centre d'expertise en logiciels libres». «Ce qu'on souhaite, c'est de faire en sorte que d'ici quelques années, nous allons avoir la concurrence nécessaire pour aller en appel d'offres dans le renouvellement des choix technologiques», «avoir de la vraie concurrence», a-t-il soutenu.

En novembre dernier, le vérificateur général a dénoncé de nombreuses lacunes dans la gestion des contrats de services informatiques : appels d'offres mal préparés, contrats donnés pour une somme supérieure à la soumission retenue et même facturation à des tarifs plus élevés que ceux prévus au contrat. Il relevait le manque de concurrence. Pour 17 des 38 contrats analysés, il n'y avait qu'une soumission conforme. En moyenne, il y avait seulement deux soumissions acceptables par contrat. «Le libre jeu de la concurrence ne s'exerce pas vraiment», disait le vérificateur.  Trois firmes ont décroché 46% du milliard de contrats informatiques accordés par tous les ministères et organismes en 2009-2010 et en 2010-2011, a-t-il constaté. Il s'agit du Groupe LGS, de CGI et de DMR (division de Fujitsu).

«Le domaine informatique, c'est une autre réalité que le domaine de la construction. Il y a beaucoup d'argent avec peu de joueurs. C'est ça, la réalité. Nous, ce qu'on souhaite, c'est augmenter le nombre de joueurs», a affirmé Stéphane Bédard.