Les entreprises de 25 à 49 employés devront débourser au total 23 millions pour se conformer aux nouvelles dispositions sur la francisation prévues par le projet de loi 14. Par la suite, il en coûtera à ces firmes environ 4,3 millions de plus chaque année par rapport à la situation actuelle.

Dès le début de la commission parlementaire, qui s'étendra sur cinq semaines, la ministre responsable de la Charte de la langue française, Diane De Courcy, a déposé une «analyse des impacts économiques» du projet de loi. L'étude, réalisée pour le ministère de l'Immigration, estime par exemple que les coûts de «l'autoévaluation» préconisée par le projet de loi seront d'environ 340$ en moyenne pour chacune des 12 000 entreprises visées. D'autres dépenses - par exemple, changer les claviers d'ordinateur anglais - coûteraient de 870 à 220$ par société, selon sa taille.

Selon Mme De Courcy, le coût d'application de la nouvelle loi est «pratiquement nul». «Je ne peux nier qu'il y aura un petit investissement, mais il est léger», a-t-elle affirmé à La Presse. Ainsi, 16 des 23 millions nécessaires viennent des besoins de «formation linguistique», que Québec couvre en bonne partie.

«Police politique linguistique»

Le critique libéral au dossier linguistique, Marc Tanguay, a attaqué le projet de loi 14, qui «autoriserait la création de la police politique linguistique sous l'emprise directe de la ministre». Réplique épidermique du côté de Mme De Courcy: «je trouve absolument déplorable cet abus de langage alors que tant de personnes ont souffert de police politique dans leur pays d'origine».

Ensuite, le député caquiste Éric Caire est monté au créneau. L'ancien réserviste exige que les enfants des bases militaires puissent fréquenter le réseau scolaire anglophone, puisqu'ils sont susceptibles de déménager partout au Canada. «Oui, je suis émotif. J'ai été militaire moi-même, et je ne vois pas pourquoi la ministre s'attaque à des gens qui ont dévoué leur vie à protéger nos droits, à protéger nos libertés, et elles lui permettent d'être souverainiste en toute impunité», a lancé M. Caire. «Pourquoi 850 enfants de militaires canadiens représentent une menace pour la culture et la langue française!», a-t-il ajouté.

Antony Housefather, maire de Côte-Saint-Luc, et Philippe Roy, son homologue de Mont-Royal, ont parlé pour l'Association des municipalités de banlieue. Ils ont réclamé que Québec laisse le statut de ville bilingue à celles qui l'ont déjà. Le projet de loi 14 prévoit que Québec puisse retirer ce statut à une ville qui compte moins de 50% d'anglophones. Plus de 70 villes ont déjà adopté des résolutions demandant à Québec de battre en retraite par rapport à ces dispositions. Les cas où on ne trouve plus que 10% d'anglophones, souvent évoqués, demeurent marginaux. Mme De Courcy a relevé que sa position n'était pas le fruit de consultations. Toutefois, relancée par La Presse, elle s'est défendue de songer à des référendums pour vérifier l'humeur des citoyens envers ces dispositions.