Le gouvernement Marois survivra au vote sur le budget. «Les Québécois ne veulent pas d'élections tout de suite», a reconnu l'ex-ministre libéral des Finances Raymond Bachand. Les députés du Parti libéral (PLQ) devraient voter contre le budget. Mais ils ne seront pas assez nombreux pour renverser le gouvernement. Chacun des 19 députés de la Coalition avenir Québec (CAQ) sera toutefois présent pour voter contre. «Si ça mène à une élection, ça mènera à une élection», a indiqué son chef, François Legault. «Il faut avoir un sens des responsabilités», a soutenu M. Bachand, en qualifiant le caquiste de «matamore».

M. Bachand n'a pas d'emblée écarté la formation d'une coalition avec la CAQ. François Legault ne voulait rien savoir. «On ne souhaite pas danser avec quelqu'un qui a les mains sales», a-t-il lancé. De son côté, Québec solidaire accuse le gouvernement péquiste d'avoir préparé un budget «d'austérité à la sauce québécoise», plus «libéral et caquiste que solidaire». «Il va nous être extrêmement difficile de voter pour le budget», a indiqué sa co-porte-parole Françoise David.

«Fausses représentations»

La CAQ accuse le gouvernement Marois d'avoir été élu «sous de fausses représentations». Comme le PLQ, elle note plusieurs promesses abandonnées et mesures-surprises dans le budget. Parmi elles: la taxe santé, qui sera modifiée au lieu d'être abolie; le fonds nationaliste à la Caisse de dépôt, qui est oublié pour rassurer les agences de crédit; le Fonds des générations, qui sera maintenu malgré un paiement de 1 milliard sur la dette l'année prochaine; l'abolition de 2000 postes à Hydro-Québec; et l'indexation des tarifs d'électricité, que le Parti québécois promettait de geler. De plus, la Régie de l'énergie pourra demander une seconde augmentation. «Ça n'a jamais été dit pendant la campagne électorale», a dénoncé M. Legault.

Le budget Marceau reporte aussi la hausse des redevances minières. «Ça fait pourtant des années qu'ils hurlent à ce sujet-là», a rappelé M. Bachand. «Le seul engagement qu'ils respectent, c'est leur abdication face aux étudiants», a-t-il ajouté. En attendant les décisions sur les redevances ou le financement des universités, «l'incertitude» perdure, croit M. Bachand.

La CAQ et le PLQ s'inquiètent en outre du manque de détails du budget sur les dépenses et les compressions. «Quel programme ou service sera coupé? On n'a aucune réponse», a déploré le libéral Sam Hamad. Il donne en exemple les compressions de 7,5 milliards d'ici cinq ans dans le programme d'infrastructures. Les dépenses du gouvernement augmenteront de 1,8% l'année prochaine. La CAQ et Québec solidaire craignent qu'on ne fasse des réductions dans les services pour respecter cette cible ambitieuse. «Le rôle premier d'un gouvernement, c'est de donner des services, pas d'équilibrer un budget», a insisté le député Amir Khadir.

«Perte exceptionnelle»

Par ailleurs, la fermeture de Gentilly-2 double presque le déficit et viole la loi sur l'équilibre budgétaire. Le gouvernement modifiera donc la loi pour permettre cette «perte exceptionnelle». «C'est un écran de fumée», a dit M. Bachand. La CAQ ne s'oppose pas à ce qu'on change la loi. «Mais si c'est vrai pour les dépenses, c'est vrai pour les revenus», a dit M. Legault. Par «cohérence», il demande donc qu'on exclue aussi les revenus exceptionnels de 2,1 milliards versés en deux ans par Ottawa pour l'harmonisation des taxes de vente.

- Avec Hugo Fontaine