L'heure n'est plus à l'affrontement mais à la discussion, a fait valoir jeudi le ministre de l'Enseignement supérieur, Pierre Duchesne. Il tend la main aux étudiants, qu'il invite au sommet sur l'enseignement supérieur prévu pour la mi-février.

«Je pense qu'on manifeste fortement quand on n'est pas entendu, quand il n'y a pas d'espace pour s'exprimer, quand il n'y a pas de table où on peut se réunir. Moi, je dis à ces gens, au mouvement étudiant en général, que ce temps-là est terminé», a-t-il déclaré lors du dévoilement de la démarche consultative qui mènera au sommet sur l'enseignement supérieur.

Citoyens, groupes de réflexion, acteurs du milieu postsecondaire et étudiants sont conviés à ce vaste lieu de réflexion.

Le ministre Duchesne est conscient du fait que, sur le front étudiant, certains regroupements plus revendicateurs, dont l'Association pour une solidarité syndicale étudiante (ASSÉ), préconisent la gratuité scolaire plutôt que l'indexation des droits de scolarité, formule privilégiée par le gouvernement Marois.

La veille, l'ASSÉ avait d'ailleurs prévenu Pierre Duchesne qu'il pouvait s'attendre à des manifestations en marge de ce sommet, qui aura lieu à Montréal à la mi-février après quatre rencontres thématiques à Québec, Trois-Rivières, Rimouski et Sherbrooke.

Et à l'issue de la conférence de presse de jeudi à Montréal, à laquelle participaient également la première ministre, Pauline Marois, et son adjoint parlementaire pour les dossiers jeunesse, Léo Bureau-Blouin, le regroupement étudiant a signifié que ses associations membres ne se bousculent pas au portillon.

«On attend que les associations étudiantes se prononcent sur le sujet, mais pour l'instant les assemblées générales n'ont pas manifesté d'intérêt à y participer», a déclaré laconiquement le secrétaire aux relations externes de l'ASSÉ, Jean-Michel Savard.

Pauline Marois a invité les participants à ce sommet à faire preuve d'ouverture et de sérénité. Elle a nié que le gouvernement ait déjà fait son lit sur la question des droits de scolarité et a assuré que la gratuité scolaire n'est «pas exclue d'office».

À l'issue du point de presse, son adjoint parlementaire a précisé la philosophie du gouvernement à cet égard. «On est prêts à écouter l'ensemble des scénarios, a assuré Léo Bureau-Blouin. Mais ce qu'on demande à tous les acteurs, c'est d'arriver avec des scénarios qui sont bien étayés et qui montrent où on va aller chercher les sous. On est ouverts à entendre l'ensemble des idées, qui vont de la gratuité jusqu'à l'indexation des droits de scolarité. On n'arrive pas là avec toutes les réponses.»

Pauline Marois a par ailleurs formulé le souhait que le débat sur les droits de scolarité n'occulte pas les autres thèmes qui feront l'objet de discussions, dont la qualité de l'enseignement supérieur, la gouvernance et le financement des universités ainsi que la recherche universitaire.

«Le champ de réflexion est très large, très vaste, et moi, ce que je souhaite, c'est que les autres aspects de ce sommet aient autant d'importance, si ce n'est davantage, parce qu'on veut sortir de là en définissant quelle sera la société du savoir dans laquelle nous vivrons», a-t-elle déclaré.

La Fédération étudiante collégiale du Québec (FECQ) se réjouit à l'idée de participer aux consultations et juge l'exercice très positif pour l'avenir de l'éducation postsecondaire au Québec.

«Tous les éléments sont là pour avoir un débat fructueux qui va mener à des conclusions qui vont permettre de faire évoluer notre système d'enseignement supérieur», a indiqué la présidente de la FECQ, Éliane Laberge.

Même son de cloche du côté de la Fédération étudiante universitaire du Québec (FEUQ), qui se réjouit de constater que son appel à l'ouverture du débat a été entendu. «On a voulu élargir la discussion et le débat dans le cadre du printemps. Maintenant que tout est un peu retombé, ça nous permet d'avoir de réelles discussions», a affirmé Martine Desjardins, présidente de la fédération.

Du côté de Québec, les partis de l'opposition ont accueilli avec beaucoup de scepticisme l'annonce du gouvernement péquiste.

L'opposition libérale ne s'engage même pas pour l'instant à y participer, tellement elle estime que «les dés sont pipés» en faveur du gel des droits de scolarité. Le sommet est «déjà orienté», a commenté en point de presse le porte-parole de l'opposition officielle en matière d'enseignement supérieur, Gerry Sklavounos.

La Coalition avenir Québec (CAQ) ne paraît pas davantage rassurée. Son chef estime que le gouvernement a mal posé la question de départ en refusant de reconnaître et d'évaluer le sous-financement des universités avant de se lancer dans un exercice de consultations.

«Si on ne reconnaît pas le sous-financement, ce sera le sommet des illusions», craint François Legault, qui plaide pour que les universités québécoises demeurent concurrentielles par rapport à celles des autres provinces.

Mais contrairement aux libéraux, les caquistes affirment d'emblée qu'ils vont participer aux travaux et chercher à y défendre leurs idées.