La commission parlementaire Mourir dans la dignité proposait de permettre «l'aide médicale à mourir». Avant de faire un geste, le gouvernement Charest veut examiner plus attentivement les aspects juridiques de cette question.

Le ministre de la Justice, Jean-Marc Fournier, a annoncé hier qu'un mandat avait été confié à Me Jean-Pierre Ménard, avocat spécialisé en droit médical, pour pousser l'analyse des conséquences juridiques des propositions unanimes faites par la commission parlementaire en mars dernier. Ces recommandations «nécessitent un éclairage plus approfondi», observe M. Fournier, rappelant que le Code criminel prohibait le suicide assisté. «Les enjeux sont importants sur les plans éthique, social et médical. Il y a aussi des questions importantes sur le plan juridique», observe M. Fournier. La commission proposait qu'un projet de loi pour encadrer «l'aide médicale à mourir» soit déposé à l'Assemblée nationale avant juin 2013.

Me Ménard sera épaulé par Me Jean-Claude Hébert et un autre juriste. Leur rapport est attendu pour octobre prochain.

Pour le ministre Fournier, il convient de vérifier s'il est juridiquement acceptable qu'un médecin aide un patient à mourir et qu'il soit à l'abri de poursuites de qui que ce soit. Il y a trois formes d'interventions: les soins palliatifs, l'interruption volontaire des soins nécessaires à la vie et l'aide médicale à mourir. «La frontière peut être difficile à tracer; l'aide à mourir peut soulever des questions par rapport au droit criminel. Il y a une nuance importante entre l'interruption de soins, abréger la vie en ne faisant rien et l'aide à mourir, qui suppose qu'un geste est posé», indique M. Fournier.

Pour Me Ménard, Québec pourrait autoriser cette démarche sans qu'elle nécessite d'amendement au Code criminel, qui est de compétence fédérale.

Selon M. Fournier, on doit aussi vérifier la portée d'une autre recommandation de la commission parlementaire, qui suggérait que le procureur général donne des directives au directeur des poursuites criminelles et pénales afin de ne pas déposer d'accusations contre les médecins qui auraient aidé un patient à mettre fin à ses souffrances.

Après deux ans de travail, la commission parlementaire avait proposé, dans son rapport unanime, qu'un malade puisse demander de mettre fin à ses jours quand il éprouvait de très profondes souffrances qui ne pouvaient être soulagées autrement.

Dans une décision très partagée, en 1993, la Cour suprême avait dit non au suicide assisté. Me Ménard souligne que ce jugement date de 19 ans et que l'opinion publique et la société sont aujourd'hui beaucoup plus ouvertes au principe qu'un médecin, dans des conditions étroitement balisées, puisse aider un patient à abréger sa vie, estime-t-il.

Pour sa part, le ministre de la Santé, Yves Bolduc, a indiqué que d'autres demandes du rapport de la commission parlementaire, dont l'augmentation du nombre de lits de soins palliatifs, étaient en bonne voie de réalisation. «Il y a un consensus au Québec. C'est la commission qui a reçu le plus de mémoires», a dit M. Bolduc.

Le Québec compte près de 700 de ces lits et selon les calculs des parlementaires, il en manquerait une centaine, qui seront accessibles d'ici 2015. De plus, Québec veut mettre en place des soins à domicile particuliers pour permettre à plus de gens de finir leurs jours dans leur milieu familial.